Ernst Jünger décédé à l'age de 102 ans (mardi 17 février 1998) à Wilflingen, petite ville de Souabe (Allemagne) où il s'était retiré depuis les années 50. Il était l'auteur d'une centaine d'ouvrages dont une cinquantaine traduits en français chez, notamment, Bourgois et Gallimard. Avec sa mort, disparaît le dernier grand écrivain témoin de ce siècle.Hélas, bien peu d'intellectuels français lui ont rendu hommage à l'annonce de sa disparition.
Selon son éditeur allemand Michel Klett (le Monde du 19 février 1998), "C'était un personnage absolument hiératique, énigmatique, que l'on ne peut pas enfermer dans un système. Il était à la fois conservateur et optimiste, marqué à droite et souvent reconnu par les intellectuels (allemands) de gauche comme faisant partie des leurs".
En 1913, il se rend à Sidi-Bel-Abbès (Algérie) pour s'engager dans la Légion étrangère et racontera cet épisode dans "Jeux Africains" (1936). Un an plus tard, il s'engagera comme volontaire dans l'armée allemande sur les fronts des Flandres et de la Somme où il sera blessé à plusieurs reprises. Il restera officier dans la Rechswelrr jusqu'en 1923. Dans"Orage d'acier" (1920), puis dans "Guerre notre mère"(1922) et dans "Feu et sang"(1925), il exprimera sa fascination pour la guerre tout comme sa répulsion. Il exaltera la guerre en tant qu'expérience spirituelle métaphysique et transcendantale permettant les retrouvailles de l'homme avec lui-même. Il voyait dans les déluges de feu et d'acier, le feu purificateur qui" remettait tout à plat" et révélait la valeur de l'homme.
Dans les années 25, il se dira anarchiste-conservateur et fréquentera à Berlin les Cercles nationaux-révolutionnaires, mais refusera d'adhérer au Parti Nazi (1931) en dépit des sollicitations. Sans doute percevait-il déjà des dérives réactionnaires débouchant sur une tragédie : la mort de dizaines de millions d'hommes et une Allemagne en ruines dont les vainqueurs se seraient partagés la dépouille. Il fera l'objet d'une perquisition de la part de la Gestapo.En I939, il publia "Falaises de marbre", considéré comme un brûlot anti-nazi.En 1940, il fait partie des troupes d'occupation à Paris et participera à un défilé sur les champs Elysées, à cheval en tête de son bataillon. En 1942, il rédige l'appel, texte clandestin en faveur de la paix et se lie à des opposants à Hitler. En 1944, Hitler sera victime d'un attentat manqué de la part d'officiers conjurés. Bien que n'en faisant pas partie, E.Junger sera mis en disponibilité pour "inaptitude au service armée". Il apprendra par la suite que Borman et Himmler voulaient le faire comparaître devant le tribunal du Reich pour "haute trahison", certains de ses écrits étant jugés défaitistes. Il devra son salut à Hitler lui-même qui avait le plus grand respect pour le héros de la Première guerre. Par ailleurs, E.Junger comptait des amis au sein du Parti Nazi. En 1945, après la défaite allemande, il sera accusé par les procureurs de la pensée de l'époque, d'avoir, de par ses écrits, favorisé l'avènement du national-socialisme. Breicht interviendra pour qu'on le laisse tranquille.
Il refusera de se soumettre aux dégradantes procédures de dénazification et à leurs séances d'auto-flagellation imposées par les vainqueurs. Il s'offrira même le luxe de leur faire un pied de nez en affirmant que "Falaises de marbre, "né d'un rêve, un soir où il avait bu plus que coutume, n'était pas dirigé contre Hitler...Ces ouvrages resteront interdits de publication en Allemagne, jusqu'en 1949.
En 1950, il se retira à Wilflingen où il poursuivra son œuvre littéraire jusqu'à sa mort.
Voici très succinctement les grandes lignes de la vie d'un homme hors du commun critiqué et condamné par les médias incapables de comprendre un seul paragraphe de ses ouvrages parce qu'ils ne leurs étaient pas destinés.
E.Jünger "ne pensait pas dialectiquement , donc ni pour ni contre"(1).
Tout en restant fidèle à sa pensée et très apprécié de ses interlocuteurs, il pouvait parler de nationalisme avec des nationalistes et d'universalisme avec des universalistes
E. Jünger, d'un savoir et d'un vécu immenses était aussi bien opposé à la dictature qu'à la démocratie (la forme la plus subtile et insidieuse de la dictature) et aussi à la civilisation occidentale.
Il ne s'était certes pas débarrassé de certains tabous, et affectionnait par esthétisme les clochers. Selon "Passage à la ligne" l'église était un moindre mal et pouvait constituer un rempart à l'émergence des sectes .
E. Jünger, fut durant toute sa vie, non seulement un grand écrivain, mais aussi , un soldat (jusqu'en 1945 mais pas un militariste), un esthète, un chercheur, un aventurier, un contemplatif, un romantique, un naturaliste, un écologiste avant la lettre et la mode. La nature et son enseignement furent les plus grandes passions de sa vie.
Il fit même l'expérience de la drogue et en relata les effets et les impressions dans "Approches, drogues et ivresses".
E. Junger, ne cessa durant toute sa vie d'être "Anarque"tel qu'il se plaisait à se définir par rapport à l'anarchiste. Ce sera le fil conducteur de ses engagements.
Il soulignera les lacunes et les contradictions mais aussi les mérites de l'anarchisme dans "l'état universel"(1930) et "Eumeswil" (1977). Même s'il pensait "autrement" et avait parfois une approche différente de l'anarchisme, il n'a jamais cessé d'appartenir à notre famille, combien diverse, de pensée.
Il avait inventé ce mot "Anarque" pour désigner celui qui refuse à l'ordre social et politique, le droit de lui imposer ses valeurs. E. Jünger nous laisse en héritage son œuvre gigantesque et des repères, afin de nous aider à "passer la ligne" en cette fin de 20ieme siècle et à recourir aux forêts ;"Le Traité du Rebelle" et "Eumeswil "(1977) pour nous aider à nous soustraire aux oppresseurs et à "trouver la sécurité dans la sauvagerie des déserts, et avant tout dans notre propre cœur afin de changer le monde" comme il l'exprima si merveilleusement dans "passage à la ligne"(1950).
Quitter les ruines pour chercher refuge dans les forêts ou dans les déserts qui peuvent tout aussi bien se trouver à l'intérieur ou au pied de ces mêmes ruines, tel est le message de Jünger que nous devons nous efforcer de comprendre. C'est le plus bel hommage que nous puissions lui rendre. Les chemins sont nombreux, mais peu aboutissent, alors, Frères, Compagnons, Camarades et Amis, tous à vos boussoles et à vos repères.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ernst_J%C3%BCnger
Selon son éditeur allemand Michel Klett (le Monde du 19 février 1998), "C'était un personnage absolument hiératique, énigmatique, que l'on ne peut pas enfermer dans un système. Il était à la fois conservateur et optimiste, marqué à droite et souvent reconnu par les intellectuels (allemands) de gauche comme faisant partie des leurs".
En 1913, il se rend à Sidi-Bel-Abbès (Algérie) pour s'engager dans la Légion étrangère et racontera cet épisode dans "Jeux Africains" (1936). Un an plus tard, il s'engagera comme volontaire dans l'armée allemande sur les fronts des Flandres et de la Somme où il sera blessé à plusieurs reprises. Il restera officier dans la Rechswelrr jusqu'en 1923. Dans"Orage d'acier" (1920), puis dans "Guerre notre mère"(1922) et dans "Feu et sang"(1925), il exprimera sa fascination pour la guerre tout comme sa répulsion. Il exaltera la guerre en tant qu'expérience spirituelle métaphysique et transcendantale permettant les retrouvailles de l'homme avec lui-même. Il voyait dans les déluges de feu et d'acier, le feu purificateur qui" remettait tout à plat" et révélait la valeur de l'homme.
Dans les années 25, il se dira anarchiste-conservateur et fréquentera à Berlin les Cercles nationaux-révolutionnaires, mais refusera d'adhérer au Parti Nazi (1931) en dépit des sollicitations. Sans doute percevait-il déjà des dérives réactionnaires débouchant sur une tragédie : la mort de dizaines de millions d'hommes et une Allemagne en ruines dont les vainqueurs se seraient partagés la dépouille. Il fera l'objet d'une perquisition de la part de la Gestapo.En I939, il publia "Falaises de marbre", considéré comme un brûlot anti-nazi.En 1940, il fait partie des troupes d'occupation à Paris et participera à un défilé sur les champs Elysées, à cheval en tête de son bataillon. En 1942, il rédige l'appel, texte clandestin en faveur de la paix et se lie à des opposants à Hitler. En 1944, Hitler sera victime d'un attentat manqué de la part d'officiers conjurés. Bien que n'en faisant pas partie, E.Junger sera mis en disponibilité pour "inaptitude au service armée". Il apprendra par la suite que Borman et Himmler voulaient le faire comparaître devant le tribunal du Reich pour "haute trahison", certains de ses écrits étant jugés défaitistes. Il devra son salut à Hitler lui-même qui avait le plus grand respect pour le héros de la Première guerre. Par ailleurs, E.Junger comptait des amis au sein du Parti Nazi. En 1945, après la défaite allemande, il sera accusé par les procureurs de la pensée de l'époque, d'avoir, de par ses écrits, favorisé l'avènement du national-socialisme. Breicht interviendra pour qu'on le laisse tranquille.
Il refusera de se soumettre aux dégradantes procédures de dénazification et à leurs séances d'auto-flagellation imposées par les vainqueurs. Il s'offrira même le luxe de leur faire un pied de nez en affirmant que "Falaises de marbre, "né d'un rêve, un soir où il avait bu plus que coutume, n'était pas dirigé contre Hitler...Ces ouvrages resteront interdits de publication en Allemagne, jusqu'en 1949.
En 1950, il se retira à Wilflingen où il poursuivra son œuvre littéraire jusqu'à sa mort.
Voici très succinctement les grandes lignes de la vie d'un homme hors du commun critiqué et condamné par les médias incapables de comprendre un seul paragraphe de ses ouvrages parce qu'ils ne leurs étaient pas destinés.
E.Jünger "ne pensait pas dialectiquement , donc ni pour ni contre"(1).
Tout en restant fidèle à sa pensée et très apprécié de ses interlocuteurs, il pouvait parler de nationalisme avec des nationalistes et d'universalisme avec des universalistes
E. Jünger, d'un savoir et d'un vécu immenses était aussi bien opposé à la dictature qu'à la démocratie (la forme la plus subtile et insidieuse de la dictature) et aussi à la civilisation occidentale.
Il ne s'était certes pas débarrassé de certains tabous, et affectionnait par esthétisme les clochers. Selon "Passage à la ligne" l'église était un moindre mal et pouvait constituer un rempart à l'émergence des sectes .
E. Jünger, fut durant toute sa vie, non seulement un grand écrivain, mais aussi , un soldat (jusqu'en 1945 mais pas un militariste), un esthète, un chercheur, un aventurier, un contemplatif, un romantique, un naturaliste, un écologiste avant la lettre et la mode. La nature et son enseignement furent les plus grandes passions de sa vie.
Il fit même l'expérience de la drogue et en relata les effets et les impressions dans "Approches, drogues et ivresses".
E. Junger, ne cessa durant toute sa vie d'être "Anarque"tel qu'il se plaisait à se définir par rapport à l'anarchiste. Ce sera le fil conducteur de ses engagements.
Il soulignera les lacunes et les contradictions mais aussi les mérites de l'anarchisme dans "l'état universel"(1930) et "Eumeswil" (1977). Même s'il pensait "autrement" et avait parfois une approche différente de l'anarchisme, il n'a jamais cessé d'appartenir à notre famille, combien diverse, de pensée.
Il avait inventé ce mot "Anarque" pour désigner celui qui refuse à l'ordre social et politique, le droit de lui imposer ses valeurs. E. Jünger nous laisse en héritage son œuvre gigantesque et des repères, afin de nous aider à "passer la ligne" en cette fin de 20ieme siècle et à recourir aux forêts ;"Le Traité du Rebelle" et "Eumeswil "(1977) pour nous aider à nous soustraire aux oppresseurs et à "trouver la sécurité dans la sauvagerie des déserts, et avant tout dans notre propre cœur afin de changer le monde" comme il l'exprima si merveilleusement dans "passage à la ligne"(1950).
Quitter les ruines pour chercher refuge dans les forêts ou dans les déserts qui peuvent tout aussi bien se trouver à l'intérieur ou au pied de ces mêmes ruines, tel est le message de Jünger que nous devons nous efforcer de comprendre. C'est le plus bel hommage que nous puissions lui rendre. Les chemins sont nombreux, mais peu aboutissent, alors, Frères, Compagnons, Camarades et Amis, tous à vos boussoles et à vos repères.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ernst_J%C3%BCnger