La nouvelle loi sur les bandes a donné lieu à une première comparution immédiate de deux jeunes de 19 et 20 ans interpellés préventivement parce qu’ils étaient soupçonnés de se rendre à une rixe entre bandes rivales, organisée à La Défense. Ils ont été arrêtés en gare de Houilles-Carrières. Ils n’ont commis aucun délit, sauf celui d’avoir eu l’intention d’en commettre un, ce que sanctionne cette nouvelle disposition répressive, qui les accuse d’avoir
participé sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violence volontaire contre des personnes ou de dégradations de biens
Donc si vous vous rendez à un pique nique (vous avez un couteau dans votre sac) le jour où un autre groupe est soupçonné de préparer une bagarre, et que vous vous trouvez dans le même wagon, vous risquez jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende, sans avoir rien fait. Une porte grande ouverte sur l’erreur judiciaire, qui risque de n’avoir aucun impact dissuasif, tant le problème visé ne peut être contenu de cette manière, comme le prouve l’empilement de lois de plus en plus répressives depuis 2004 sans aucun résultat sur la délinquance, toute manipulation de statistiques mise à part. (Voir aussi cet article et cette démonstration)
C’est pour ce genre de "faits" (notamment la possession d’un couteau de 7cm) que les deux jeunes ont été inculpés. Si par dessus le marché vous portez un sweat à capuche, votre défense risque d’être peu crédible. La loi permet donc à l’Etat d’intimider tout citoyen sur de simples présomptions. Si cela n’est pas une atteinte grave aux principes et à l’esprit de la démocratie, je ne vois pas dans quel ailleurs peut se situer cette limite. Je ne vois plus aucun argument qui empêche de continuer à repousser les garde-fous qui protègent de l’arbitraire. Cette ligne forte et essentielle, qui a été dépassée une première fois avec la loi portant sur la rétention de sûreté, nous emmène lentement mais continuellement vers l’abandon de nos droits.
Par ailleurs, on apprend dans le même article, publié aujourd’hui dans Le Monde que certains jeunes étaient armés de Taser, un pistolet électrique capable d’administrer à distance une décharge de 50 000 volts, ce qui paralyse l’adversaire, et peut avoir de graves conséquences sur la santé, notamment sur le cœur. Un effet pervers que j’avais prédit, à l’époque de l’autorisation délivrée par l’Etat pour ce genre d’arme (en les classifiant abusivement dans une catégorie autorisant la vente au public).
Source : http://libertes.blog.lemonde.fr/2010/05/18/premiere-application-de-la-loi-sur-les-bandes/
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Même du temps où les duels étaient punis de mort on n’arrêtait pas les gens tant qu’il n’y avait pas un début de réalisation.
Et pour cause: tout le monde peu avoir des envies violentes. Et rien ne permet de distinguer l’intimidation d’un projet réellement violent.
Cela ne signifie pas que la police ne doit rien faire: c’est son rôle, en cas de danger sérieux, d’empêcher le contact en s’interposant, en plaçant des barrières… Mais il y a un fossé entre le fait d’empêcher quelqu’un de franchir une limite et celui de le condamner pour délit d’intention.
la tendance automatique de l’État est à son renforcement, les nouvelles lois de surveillance, de contrôle, et les installations qui vont avec le montrent chaque jour. La réalité d’une démocratie ne se mesure pas aux vertus du pouvoir mais à la force des contre-pouvoirs.
Et c’est bien ce qui manque, aujourd’hui, les contre-pouvoirs. Leur déliquescence lente, depuis une trentaine d’année, a laissé le pouvoir occuper seul le terrain, et nous aboutissons à une société de plus en plus totalitaire, où n’importe quoi peut vous être reproché. Les dissidents de Tarnac en ont fait l’expérience, mais tout le monde aussi, obligés que nous sommes désormais de faire attention à nos moindres paroles, nos moindres gestes, nos déplacements, nos fréquentations…, tant la délation est devenue commune.
Il faut résister et reconstruire des contre-pouvoirs suffisamment forts pour reprendre du terrain à l’État, si on aime la liberté.
participé sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violence volontaire contre des personnes ou de dégradations de biens
Donc si vous vous rendez à un pique nique (vous avez un couteau dans votre sac) le jour où un autre groupe est soupçonné de préparer une bagarre, et que vous vous trouvez dans le même wagon, vous risquez jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende, sans avoir rien fait. Une porte grande ouverte sur l’erreur judiciaire, qui risque de n’avoir aucun impact dissuasif, tant le problème visé ne peut être contenu de cette manière, comme le prouve l’empilement de lois de plus en plus répressives depuis 2004 sans aucun résultat sur la délinquance, toute manipulation de statistiques mise à part. (Voir aussi cet article et cette démonstration)
C’est pour ce genre de "faits" (notamment la possession d’un couteau de 7cm) que les deux jeunes ont été inculpés. Si par dessus le marché vous portez un sweat à capuche, votre défense risque d’être peu crédible. La loi permet donc à l’Etat d’intimider tout citoyen sur de simples présomptions. Si cela n’est pas une atteinte grave aux principes et à l’esprit de la démocratie, je ne vois pas dans quel ailleurs peut se situer cette limite. Je ne vois plus aucun argument qui empêche de continuer à repousser les garde-fous qui protègent de l’arbitraire. Cette ligne forte et essentielle, qui a été dépassée une première fois avec la loi portant sur la rétention de sûreté, nous emmène lentement mais continuellement vers l’abandon de nos droits.
Par ailleurs, on apprend dans le même article, publié aujourd’hui dans Le Monde que certains jeunes étaient armés de Taser, un pistolet électrique capable d’administrer à distance une décharge de 50 000 volts, ce qui paralyse l’adversaire, et peut avoir de graves conséquences sur la santé, notamment sur le cœur. Un effet pervers que j’avais prédit, à l’époque de l’autorisation délivrée par l’Etat pour ce genre d’arme (en les classifiant abusivement dans une catégorie autorisant la vente au public).
Source : http://libertes.blog.lemonde.fr/2010/05/18/premiere-application-de-la-loi-sur-les-bandes/
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Même du temps où les duels étaient punis de mort on n’arrêtait pas les gens tant qu’il n’y avait pas un début de réalisation.
Et pour cause: tout le monde peu avoir des envies violentes. Et rien ne permet de distinguer l’intimidation d’un projet réellement violent.
Cela ne signifie pas que la police ne doit rien faire: c’est son rôle, en cas de danger sérieux, d’empêcher le contact en s’interposant, en plaçant des barrières… Mais il y a un fossé entre le fait d’empêcher quelqu’un de franchir une limite et celui de le condamner pour délit d’intention.
la tendance automatique de l’État est à son renforcement, les nouvelles lois de surveillance, de contrôle, et les installations qui vont avec le montrent chaque jour. La réalité d’une démocratie ne se mesure pas aux vertus du pouvoir mais à la force des contre-pouvoirs.
Et c’est bien ce qui manque, aujourd’hui, les contre-pouvoirs. Leur déliquescence lente, depuis une trentaine d’année, a laissé le pouvoir occuper seul le terrain, et nous aboutissons à une société de plus en plus totalitaire, où n’importe quoi peut vous être reproché. Les dissidents de Tarnac en ont fait l’expérience, mais tout le monde aussi, obligés que nous sommes désormais de faire attention à nos moindres paroles, nos moindres gestes, nos déplacements, nos fréquentations…, tant la délation est devenue commune.
Il faut résister et reconstruire des contre-pouvoirs suffisamment forts pour reprendre du terrain à l’État, si on aime la liberté.