On trouve une explication exhaustive dans le Dictionnaire du Coran. Vingt-sept auteurs ont travaillé sous la direction de Mohammad Ali Amir-Moezzi, directeur d'études à l'Ecole pratique des hautes études (Sorbonne) et titulaire de la chaire de théologie islamique et d'exégèse coranique classique. Il est également directeur adjoint du Laboratoire d'études sur les monothéismes, équipe de recherche du CNRS, et auteur de très nombreux livres et articles scientifiques portant notamment sur l'islam chiite.
"Pour l’Evangile, la question est un peu plus compliquée. Au VIIIè/XIVè siècle, Anselm Turmeda, franciscain catalan converti à l’islam et fixé en Tunisie, raconte, dans la partie autobiographique de son traité polémique antichrétien, qu’un prêtre de Bologne lui a révélé que le Paraclet annoncé dans l’Evangile est le prophète de l’islam, Mahomet, et que cette révélation lui a ouvert le chemin de la conversion. Ce texte de Turmeda, Tuhfat al-adîb (le Présent de l’homme lettré pour réfuter les partisans de la croix), est de nos jours très diffusé, tant au Maghreb que parmi les musulmans d’Europe. […] L’établissement d’une relation entre le texte coranique et le texte évangélique s’est opéré par une « captation » reposant sur deux formes de détournement linguistique. La première a été faite par un converti du christianisme, connaissant le syriaque mais sans doute assez mal l’arabe, et dont l’interprétation a été reprise dans la Sîra nabawiyya d’Ibn Ishâq (150/767) et Ibn Hishâm (218/833), au paragraphe consacré à la « description [sifa] de l’Envoyé de Dieu par l’Evangile ». Le grec paraklètos étant rendu en syriaque par mnahmânâ (lumunhamannâ, le reste de la citation étant également une adaptation très approximative du texte de Jean), Ibn Ishâq conclut : « al-munhamannâ, en syriaque, c’est Mahomet, et dans la langue des grecs al-baraqlitis ». Or le premier est de la racine sémitique n.h.m. (« consoler »), bien connue des fidèles à cause du célèbre passage d’Isaïe : « consolez, consolez mon peuple dit Dieu » (Is 40,1). En passant au syriaque, cette racine a pris le sens de relever, redresser, ce qui expique qu’on ait utilisé un de ces composés pour traduire le grec paraklètos (« avocat », « intercesseur »). Avec la racine h.m.d. de Mahomet, elle n’a de commun que deux lettres, et pas dans l’ordre. Aussi cet argument n’a-t-il pas eu de succès au Moyen-Orient où a subsisté un nombre non négligeable de chrétiens dont le syriaque était la langue liturgique, et qui étaient en mesure de dénoncer la confusion. A noter que seule la recension palestinienne des Evangiles emploie le terme mnahmânâ, mais non la Pshitta (traduction syriaque de la Bible), laquelle use de la transcription phonétique Paraqlîta. Dans le « dialogue » du patriarche nestorien Thimotée 1er avec le calife al-Mahdi (qui a régné environ de l’an 159 à l’an 169 de l’Hégire, de 775 à 785), la question de l’assimilation du prophète de l’islam avec le Paraclet est bien abordée, mais en ces termes (al-Fâraqlît par exemple) qui ne permettent aucune confusion, et l’assimilation musulmane est réfutée par des arguments strictement théologiques dans la version arabe, psychologiques dans la version syriaque plus développée. Plus tard, le nestorien converti à l’islam, ‘Alî b. Rabbân al-Tabarî (241/855), consacre tout un chapitre de son Kitâb al-Dîn wa-l-dawla à cet argument, mais en s’appuyant uniquement sur la transcription Paraqlîtâ. En revanche, au Maghreb, où le syriaque n’était pas connu, l’argument linguistique a rencontré un grand succès. En Orient, on s’est rabattu sur une seconde forme de dérivation, en affirmant que paraklètos est une altération de periklutos (« illustre », « renommé »), ce qui revenait à traiter une langue indo-européenne comme une langue sémitique, où intervient la variation de vocalisation. Cette démarche est étayée par l’accusation coranique faite aux « Gens du livre » d’avoir « falsifié » (tahrîf) les Ecritures. (Dictionnaire du Coran p.56)
Pour les Duodécimains, ce sera le douzième Imâm, parfois identifié au Paraclet de l’Evangile, qui mettra fin à notre présent état d’occultation en restaurant l’unité initiale entre l’ésotérique et l’exotérique. (Dictionnaire du Coran, p.68 ). "
"Pour l’Evangile, la question est un peu plus compliquée. Au VIIIè/XIVè siècle, Anselm Turmeda, franciscain catalan converti à l’islam et fixé en Tunisie, raconte, dans la partie autobiographique de son traité polémique antichrétien, qu’un prêtre de Bologne lui a révélé que le Paraclet annoncé dans l’Evangile est le prophète de l’islam, Mahomet, et que cette révélation lui a ouvert le chemin de la conversion. Ce texte de Turmeda, Tuhfat al-adîb (le Présent de l’homme lettré pour réfuter les partisans de la croix), est de nos jours très diffusé, tant au Maghreb que parmi les musulmans d’Europe. […] L’établissement d’une relation entre le texte coranique et le texte évangélique s’est opéré par une « captation » reposant sur deux formes de détournement linguistique. La première a été faite par un converti du christianisme, connaissant le syriaque mais sans doute assez mal l’arabe, et dont l’interprétation a été reprise dans la Sîra nabawiyya d’Ibn Ishâq (150/767) et Ibn Hishâm (218/833), au paragraphe consacré à la « description [sifa] de l’Envoyé de Dieu par l’Evangile ». Le grec paraklètos étant rendu en syriaque par mnahmânâ (lumunhamannâ, le reste de la citation étant également une adaptation très approximative du texte de Jean), Ibn Ishâq conclut : « al-munhamannâ, en syriaque, c’est Mahomet, et dans la langue des grecs al-baraqlitis ». Or le premier est de la racine sémitique n.h.m. (« consoler »), bien connue des fidèles à cause du célèbre passage d’Isaïe : « consolez, consolez mon peuple dit Dieu » (Is 40,1). En passant au syriaque, cette racine a pris le sens de relever, redresser, ce qui expique qu’on ait utilisé un de ces composés pour traduire le grec paraklètos (« avocat », « intercesseur »). Avec la racine h.m.d. de Mahomet, elle n’a de commun que deux lettres, et pas dans l’ordre. Aussi cet argument n’a-t-il pas eu de succès au Moyen-Orient où a subsisté un nombre non négligeable de chrétiens dont le syriaque était la langue liturgique, et qui étaient en mesure de dénoncer la confusion. A noter que seule la recension palestinienne des Evangiles emploie le terme mnahmânâ, mais non la Pshitta (traduction syriaque de la Bible), laquelle use de la transcription phonétique Paraqlîta. Dans le « dialogue » du patriarche nestorien Thimotée 1er avec le calife al-Mahdi (qui a régné environ de l’an 159 à l’an 169 de l’Hégire, de 775 à 785), la question de l’assimilation du prophète de l’islam avec le Paraclet est bien abordée, mais en ces termes (al-Fâraqlît par exemple) qui ne permettent aucune confusion, et l’assimilation musulmane est réfutée par des arguments strictement théologiques dans la version arabe, psychologiques dans la version syriaque plus développée. Plus tard, le nestorien converti à l’islam, ‘Alî b. Rabbân al-Tabarî (241/855), consacre tout un chapitre de son Kitâb al-Dîn wa-l-dawla à cet argument, mais en s’appuyant uniquement sur la transcription Paraqlîtâ. En revanche, au Maghreb, où le syriaque n’était pas connu, l’argument linguistique a rencontré un grand succès. En Orient, on s’est rabattu sur une seconde forme de dérivation, en affirmant que paraklètos est une altération de periklutos (« illustre », « renommé »), ce qui revenait à traiter une langue indo-européenne comme une langue sémitique, où intervient la variation de vocalisation. Cette démarche est étayée par l’accusation coranique faite aux « Gens du livre » d’avoir « falsifié » (tahrîf) les Ecritures. (Dictionnaire du Coran p.56)
Pour les Duodécimains, ce sera le douzième Imâm, parfois identifié au Paraclet de l’Evangile, qui mettra fin à notre présent état d’occultation en restaurant l’unité initiale entre l’ésotérique et l’exotérique. (Dictionnaire du Coran, p.68 ). "