L'attention du lecteur éveillé est requise ici j'aimerais partager avec vous mes réflexions à propos d'un sujet qui me semble d'une portée capitale pour tout chercheur de Vérité. C'est un sujet complexe et vaste, bien plus que n'importe qui pourrait l'imaginer. Aussi pour l'appréhender il y aurait beaucoup de choses à dire. Vous le comprendrez, cela pourrait s'assimiler à un jeu de piste, et nous risquons de nous éloigner du sujet de départ. Mais il me semble que ce sera pour mieux y revenir car le Mariage Sacré est une sorte de fil conducteur, et c'est à partir de là que je développerai. Certes pour certains il y aura quelques révélations qui seront faites. Mais j'espère surtout nourrir quelques vocations afin d'approfondir, ouvrir de nouvelles pistes de réflexions et bien sûr de mettre en commun nos idées. Pour ma part je ne maitrise pas vraiment le sujet, je ne dispose pas de document exceptionnel faisant autorité - le sujet est peu documenté et rarement abordé - je n'ai que les outils du net et quelques livres (très peu), je tenterai d'élaborer ma réflexion à partir de sources très diverses, en faisant ressortir des analogies et éléments clés.
Introduction:
Le Mariage Sacré est un rituel très ancien et mettant en relation de nombreuses croyances, traditions. Il est un symbole puissant de toute tradition païenne. Il relie des sociétés primitives comme l'Egypte antique, Babylone, la Grêce, Rome, les celtes, les scandinaves, les coréens, les chinois, les peuples d'Afrique, du Moyen Orient... etc aux écoles des mystères, au chamanisme, aux cathares, aux templiers, aux roses-croix, à l'Ordo Templis Orientis et à la Monarchie, celle qui fait autorité puisque d'origine divine.
Définition:
Voyons ce que nous dit wikipédia à propos du Mariage Sacré:
Hieros Gamos ou Hiérogamie, (du Grec hieros = sacrée et gamos = mariage, rapport sexuel), désigne une union sacrée à caractère sexuel, un accouplement (parfois mariage) le plus souvent entre deux divinités ou entre un dieu et un homme ou une femme.
Sommaire
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1 Définition
2 Histoire
2.1 Dans l'optique païenne
2.2 Dans l'optique mystique
3 Exemples
4 Voir aussi
Définition[modifier]
La hiérogamie se situe dans un cadre symbolique, souvent rituel, elle associe à l'activité sexuelle un signifiant d'ordre symbolique ou mystique.
Elle peut qualifier l'union sexuelle de principes divins, mais aussi les pratiques rituelles visant à remettre en scène ces phénomènes divins, ou simplement des relations sexuelles ritualisées, où la consommation sexuelle a valeur de symbole mystique.
Le psychanalyste Carl Gustav Jung la place parmi d'autres symboles fondamentaux universels de l'humanité, dans son ouvrage Métamorphoses de l'âme et ses symboles.
Histoire[modifier]
Il s'agit d'une notion très ancienne, retrouvée dans nombre de civilisations. La tradition véhicule une pléthore d'exemples tel Horus, fruit de l'union d'Isis et de son frère Osiris, qui montre de plus que cette notion ne prend pas en compte l'interdit de l'inceste. Le rite hiérogamique, présent dans une foule de cultes antiques, est repris dans le cérémonial de nombreuses sociétés secrètes.
On peut distinguer deux types de hiérogamies : la version païenne et la version mystique.
Dans l'optique païenne[modifier]
Dans plusieurs traditions païennes et néo-païennes, où une analogie est établie entre la fertilité de la terre et la fécondité de la femme, la hiérogamie, le plus souvent accomplie dans la nuit précédant le 1er mai (célébration de Beltaine dans la mythologie celtique, nuit de Walpurgis dans le folklore germanique), est un rite de fertilité, censé symboliser la plantation de la graine dans la Terre et favoriser les pluies.
Dans l'optique mystique[modifier]
Dans d'autres contextes, le Hieros Gamos revêt la forme d'un rite initiatique qui permettrait aux participants d'acquérir une expérience religieuse profonde par des rapports sexuels. Certains experts y voient une référence à la théorie néo-platonicienne selon laquelle une âme est originellement androgyne et se scinde en deux lors de l'incarnation sur terre, sa part féminine allant dans un corps de femme et sa part masculine dans un corps d'homme. Dans cette optique, la plénitude spirituelle ne serait retrouvable que dans la réunion des principes complémentaires (« syzygie ») qu'offre une hiérogamie.
Une telle vision se retrouve dans le gnosticisme, qui pose l'“assomption syzygique” (réunion du masculin et du féminin) comme l'une des plus hautes fins de l'existence spirituelle d'un être humain. On peut citer à ce titre le logion 22 de l’Évangile selon Thomas (apocryphe chrétien issu de la bibliothèque de Nag Hammadi) : « [...] n°7 : Irons-nous dans le Royaume ? Jésus leur dit : Quand vous ferez le deux Un, [...] afin de faire le mâle et la femelle en un seul [...] ».
Exemples[modifier]
En Mésopotamie, au printemps, le rite du mariage sacré unissait le Roi (remplaçant le dieu Dumuzi) et la prêtresse (représentante de la Déesse Ishtar). Les festivités étaient très joyeuses et se déroulaient dans l’allégresse.
L'existence de tels rituels depuis des temps immémorables a souvent laissé des traces dans plusieurs cultures, ce qui a suscité des accusations de relations incestueuses à l'égard de plusieurs groupes religieux jugés d'hérétique comme le paulicianisme, le bogomilisme, le catharisme, l'alévisme ou le sabbétaisme.
Un exemple moderne de hiérogamie se trouve dans la religion Wicca, dans laquelle les participants s'engagent dans ce que Gerald Gardner, fondateur du culte, appelait le "Grand Rite". Un homme et une femme, assumant les identités du Dieu cornu et de la Déesse, s'engagent dans une union sexuelle pour célébrer la conjonction sacrée des principes opposés/complémentaires masculin et féminin de l'Univers.
De tels rituels sont évoqués dans le film Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick et dans le roman Da Vinci Code de Dan Brown.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Mariage_sacr%C3%A9
Il s'agit donc d'un rituel religieux et qui symbolise l'union entre 2 principes, l'un féminin et l'autre masculin. Cherchez dans toutes les mythologies du monde, il est intriguant que tous les récits de créations soient symbolisés par un union hiérogamique. C'est l'union du Ciel et de la Terre, Ouranos / Gaïa chez les grecs, Nout et Geb chez les égyptiens. Il est à remarquer qu'un récit quant à lui ne tient pas de ce principe de la création, c'est le récit de la Génèse.
L'hexagramme ou Sceau de Salomon symbolise un union de 2 principes. Formé de 2 triangles superposés, celui ayant la pointe vers le bas représente le principe féminin, tandis que la pointe vers le haut, le principe masculin.
Le "hieros gamos" a une origine perdue dans le temps et semble très ancien comme le suggère diverses statuettes ou inscriptions:
Hieros gamos, c 10,000 BC Europe, Negev Desert (Campbell 1988, Avi-Yonah)
Hieros gamos, creatrix goddess, shrine with bulls heads and pregnant Goddess.
Catal Huyuk Anatolia 7,500 B.C. - 5,500 B.C. goddess (Melaart).
source: http://www.dhushara.com/book/hieros/hieros.htm
Comme le précise Wikipédia, il faut distinguer 2 types de Mariage Sacré. L'un est un rite annuel qui était tenu au début du printemps et possède un côté symbolique; c'est un rite de fertilité. L'autre, mystique, est en fait mal connu. Il semble fort probable que le 1er type de Mariage Sacré soit une version ouverte au public et que son authentique origine se trouve dans le second type, celui-là constituant un véritable mystère. Nous tenterons d'y voir plus clair. Pour ce faire nous aurons besoin de citer des sources et introduire de nouveaux éléments de réflexion.
Voici des détails concernant cette fête religieuse à babylone (désolé pour la longueur) :
La Fête du Nouvel An
De toutes les fêtes célébrées à Babylone, celle du Nouvel An appelée Fête de « l'Akitou » était la plus importante. Le Nouvel An était déjà à l'époque sumérienne une grande solennité; nous avons des renseignements sur les « akitous » en l'honneur des divinités locales des différentes villes. Celle de Babylone allait prendre des proportions en rapport avec l'importance de la capitale et avec le culte de Mardouk. A l'époque qui a précédé la Première dynastie, le Nouvel An était célébré à des dates différentes, mais, dans la plupart des cas, c'était au mois de Tishrit, c'est-à-dire vers l'équinoxe d'automne, que l'année commençait. Il y avait même parfois deux fêtes de l'Akitou, celle d'automne et celle du printemps; c'est celle-là qui a prévalu à Babylone, après le règne de Hammourabi. La Fête du Nouvel An se célébrait vers l'équinoxe de printemps, au début du mois de « nisan » , qui correspond environ aux mois de mars-avril du calendrier grégorien et au mois d'avril du calendrier Julien. Le temps en était fixé par le lever héliaque de l'étoile « hunga » : l'alpha du Bélier. A Babylone, cette cérémonie durait douze jours. La ville de Borsippa était associée aussi aux différents épisodes de la fête; le dieu Nabou, fils du dieu Mardouk et patron de la ville, jouait un rôle de premier plan au cours de ces journées. Comme « scribe des dieux » , le dieu Nabou inscrivait les destins annuels fixés dans l'assemblée des dieux. D'autre part, il délivrait son père au cours du Mystère de la « Disparition » de Mardouk. Le roi de Babylone participait activement aux cérémonies. Il était chargé de faire le geste symbolique de « prendre la main du dieu » pour l'inviter au départ lors de la « Grande Procession » qui conduisait Mardouk dans une chapelle située en dehors de la ville appelée « Maison de l'Akitou » , où il demeurait avant de regagner la capitale. Lors d'une calamité atteignant la personne du roi ou lorsque l'ennemi rôdait autour de la ville, il fallait bien supprimer la procession : Mardouk ne sortait pas et le dieu Nabou ne venait pas de Borsippa rejoindre son père. C'était un deuil national que la Chronique babylonienne ne manquait pas de, consigner. Ainsi, lorsque le dernier roi, Nabonide, était à Teima, la Chronique note :
l'an... Nabonide... à Babylone ne vint pas, le dieu Nabou à Babylone n'alla pas. Bêl ne sortit pas, la fête de l'Akitou fut suspendue..."
Nous verrons plus loin quelle désolation les textes laissent percer à travers leur laconisme, au moment de la prise de Babylone par Cyrus.
Les cérémonies
Les cérémonies qui se déroulaient pendant la Fête du Nouvel An sont partiellement reconstituées à l'aide des rituels.
Les Sept Premiers Jours
La cérémonie du Premier Jour de l'An est encore inconnue.
Le 2 de nisan
Deux heures avant le petit jour, le Grand-Prêtre se lève, se lave dans l'eau de l'Euphrate, puis entre vêtu d'un habit de lin, dans le sanctuaire de Mardouk. Dans la prière qu'il lui adresse, il assimile Babylone au trône du dieu, Borsippa à sa tiare et les vastes cieux à son ventre. Cette oraison est secrète et n'est prononcée que par le Grand-Prêtre encore tout seul dans le sanctuaire. C'est seulement après que les portes sont ouvertes et que les autres prêtres entrent à leur tour dans le temple. Les rites sont alors accompagnés de musique et de chants liturgiques. Nous n'avons pas la suite des cérémonies de la journée.
Le 3 nisan
Après les premières prières, le Grand-Prêtre convoque des artisans d'art, leur remet de l'or, des pierres précieuses appartenant au trésor de Mardouk, ainsi que du cèdre et du tamaris. Ils exécuteront deux statuettes en or rehaussées de pierreries, l'une tenant un serpent, l'autre un scorpion et habillées toutes deux de rouge avec une corde en fibre de palmier autour des hanches. Ces statuettes seront placées dans le temple jusqu'au sixième jour.
Le 4 nisan
Bien avant le lever du soleil, les prières et les cérémonies commencent ; lorsque le Grand-Prêtre a béni l'Esagil, les portes sont ouvertes pour les autres prêtres comme les jours précédents. C'est dans la journée, après le petit repas du soir, que le Grand-Prêtre récitera devant Mardouk le célèbre Poème de la Création. Pendant ce récit la tiare du dieu Anou et le trône du dieu Enlil sont couverts.
Le 5 nisan
Dans la nuit, exercices, prières, qui assimilent les étoiles du ciel au dieu Mardouk et à sa parèdre Zarpanit. Le Grand-Prêtre appelle un Incantateur porteur d'eau lustrale, de feu et d'encens pour procéder à la purification du temple. Un sacrificateur tranche la tête d'un agneau (ou d'un bélier), le corps de l'animal est pris par l'Ineantateur qui en frotte le temple pour l'imprégner de ses impuretés ; il récite des incantations pour que l'animal emporte toutes les souillures, il jette ensuite son cadavre dans le fleuve. Il semble que nous ayons là le prototype du « bouc émissaire » . Au cours d'une cérémonie analogue on met à mort un bouc. Par ce châtiment infligé à l'animal, on pensait avoir détruit le mal dont on l'avait chargé à la place de l'homme pécheur et, par suite de ce transfert, on croyait épargner le châtiment au vrai coupable. L'Incantateur et le Purificateur doivent ensuite quitter le temple. De son côté, le GrandPrêtre ne doit pas « voir » cette cérémonie. Lorsque tout est terminé, le Grand-Prêtre convoque les Servants du Temple qui, avec « le Ciel d'Or » de Mardouk, couvriront la chapelle réservée au dieu Nabou dans l'Esagil et qui s'appelle comme son sanctuaire de Borsippa : l'Ezida. Un festin est préparé que les Servants du Temple transporteront au bord du canal où est attendu le dieu Nabou (du moins sa statue), venant de Borsippa dans sa barque. Alors a lieu dans l'Esagil une curieuse cérémonie, celle de « l'humiliation du roi » . Avant cette cérémonie, le GrandPrêtre s'adressait d'abord au dieu Mardouk, ensuite il sortait et priait alors Zarpanit en ces termes :
Madone brillante, sublime, élevée!
Parmi les déesses aucune n'est comme elle
l'accusatrice qui prend la défense !
Celle qui abaisse l'orgueilleux
et redresse l'humilié!
Celle qui terrasse celui qui ne craint pas sa divinité !
Celle qui épargne le captif, qui relève
celui qui est tombé!...
Au roi qui te craint fixe sa destinée !
Aux fils de Babylone, accorde un guerrier protecteur !
Après ces prières, le Grand-Prêtre prend les insignes royaux des mains du roi, il les place devant la statue de Mardouk et lui frappe la joue, lui tire les oreilles, le fait mettre à genoux, lui fait réciter une confession négative comme celle que l'on fait dire au pécheur que l'on doit exorciser : « je n'ai pas péché contre le dieu, je n'ai pas attenté à la majesté de l'Esagil, ni oublié ses rites » . On peut se demander si la confession du roi n'était pas faite pour le peuple tout entier. Il est difficile de l'affirmer. Mais on connaît par ailleurs « la mise à mort du roi » remplaçant en quelque sorte « la mise à mort du dieu » et il est bien possible que les tombes royales d'Our avec leur « massacre » inexplicable n'en soient des témoins. Les rites babyloniens en constitueraient une survivance atténuée.
Le Grand-Prêtre, après avoir rassuré le roi, lui rend ses insignes et le gifle à nouveau. Le texte dit :
« Il frappera la joue du roi : si ses larmes coulent, Mardouk est bien disposé ; sinon, Mardouk est en colère : l'ennemi marchera contre Babylone et il le battra. »
A la fin du jour, on creuse une fosse dans la cour du temple, on la remplit de roseaux, on y verse des libations d'huile et de graisse, et, après avoir immolé un taureau blanc au bord de la fosse, le roi met le feu aux roseaux. (Tous ces rites ont une signification.) Les insignes de la royauté sont censés être aux cieux-et lorsque les textes indiquent au début de la liste des dynasties qui régnèrent sur la Mésopotamie que « la royauté vint d'en haut » , ils montrent par là que ce sont les dieux qui accordèrent le pouvoir aux humains, ce pouvoir était, comme nous l'avons déjà indiqué, confié autrefois au roi par le dieu Enlil de Nippour. Depuis la Première dynastie, c'était Bêl Mardouk qui, désormais, choisissait le roi à Babylone.
Le 6 nisan
Le texte manque. Sans avoir la mention de l'entrée du dieu Nabou, on peut cependant supposer qu'on devait l'héberger le soir du cinquième jour. Pendant les jours qui précèdent le 8, probablement le 5 et le 6, les statues des dieux devaient arriver- de leurs temples respectifs pour assister aux cérémonies. Selon les hymnes qui nous sont parvenus ce sont tous les grands dieux : Anou, Enlil, Ea, Sin., Shamash, Adad, Ninourta et leurs parèdres ainsi qu'Ishtar. C'est sans doute aussi pendant ces journées que pouvaient se dérouler les scènes du « Mystère de la Passion de Mardouk » . Ce drame devait se jouer avec des personnages vivants plutôt qu'avec des statues. Les textes en ont été interprétés sous le titre : « La Mort et la Résurrection de Bêl-Mardouk »
« La Mort et la Résurrection de Bêl-Mardouk »
Nous ferons remarquer que ces rituels provientnent de divers centres religieux. Ils ont cependant une telle analogie entre eux qu'ils paraissent appartenir à un même thème, sans que nous osions affirmer cependant qu'ils appartiennent tous au mythe de Bêl-Mardouk.
Ce sont des « commentaires » de scènes mimées plus ou moins allégoriques, expliquant le va-et-vient des personnages et les gestes qu'ils font. Malheureusement pour nous, les textes souvent fragmentaires ne sont pas toujours compréhensibles. Nous choisissons parmi les commentaires connus un extrait du scénario du « Drame » de la passion de Bêl-Mardouk intitulé :
Cela représente Bêl lorsqu'il est enchaîné dans la montagne
(le terme « montagne » est un euphémisme pour indiquer la sépulture).
Les personnages qui entrent en scène et agissent sont l'objet d'explications qui ne sont pas toujours ni très claires ni complètes. En voici quelques passages :
Un personnage arrive et le commentaire explique ce qu'il est :
Il y a un messager qui court en disant : "Qui le fera sortir ?"
Le paragraphe suivant prédit l'arrivée du sauveur, Nabou :
Celui qui arrive le délivrera.
Un personnage va vers la « montagne » où aura lieu un interrogatoire
Celui qui se rend vers la montagne...
C'est celui qui va...
Là où il va, c'est la maison à la lisière de la montagne où on l'interrogera.
Arrivée de Nabou :
Le dieu Nabou de Borsippa arrive.
Il vient pour le salut de son père qui est « prisonnier »
Un cortège de femmes parcourt les rues en priant les dieux de l'Oracle pour Bêl :
Celles qui vont par les rues,
ce sont celles qui prient Sin et Shamash en disant: « Fais vivre Bêl ! »
Une femme cherche Bêl et supplie qu'on lui dise où il est :
Celle dont les mains sont tendues...
Vers ceux qui le cherchent en disant :
« Où est-il prisonnier ? »
Elle se rend au tombeau :
La porte vers laquelle elle va,
C'est la Porte des Tombeaux;
Elle va, elle le cherche...
Des dieux gardent la tombe :
Les Jumeaux qui sont à la porte de l'Esagil,
ce sont ses gardiens.
Ils sont commis à sa garde.
Quelqu'un va réciter la lamentation funèbre :
Celui (qui récite) la lamentation :
« Après, que les dieux l'ont enfermé,
il a disparu du monde des vivants. »
« Dans la prison où ne pénètre pas le soleil ni la lumière,
ils l'ont fait descendre! »
On procède à la toilette funèbre :
Celui qui est aux pieds,
ceux qui s'approchent et l'habillent.
On lave ses blessures :
Ce sont les blessures dont il est blessé;
Eux, ils sont teints de son sang.
Une déesse est prosternée près de lui :
La déesse qui à côté de lui est prosternée;
pour le sauver elle est descendue.
Ce passage rappelle « la descente d'Ishtar aux Enfers ».
D'autres fragments sont plus obscurs :
l'homme... qui ne veut pas aller avec lui
et qui dit : « Moi ! je ne suis pas coupable ! »
Le commentaire suivant indique qu'un « procès » a eu lieu :
Les hommes... devant « lui » ont ouvert mon procès,
Mon droit, ils l'ont mis en pièces !
Par ailleurs, on décrit ainsi le tumulte de la ville :
C'est après que Bel est allé dans la « montagne »
Il y a des rixes dans la ville à cause de lui.
Enfin, le commentaire suivant devient plus clair et indique que les actes sont accomplis par des Mages remplaçant les héros du drame :
Les Magiciens vont devant lui,
ils récitent une incantation :
ce sont les gens qui vont devant lui en se lamentant.
La scène finale dépeint le chagrin du messager et la douleur de la déesse :
Le Mage qui devant Bêlit de Babylone va :
c'est le héraut qui contre sa poitrine pleure
en disant : « Vers la « montagne » on l'emporte ! »
Elle, elle pousse un cri :
« O mon frère! ô mon frère! »
Quelques-uns de ces fragments ont été recopiés au VIIe siècle à Assour pour la bibliothèque d'Assourbanipal et ces « commentaires » devaient rester secrets, la tablette se termine ainsi :
Quiconque détruira cette tablette
ou la jettera dans l'eau
ou celui qui la montrera à celui qui ne doit pas en avoir connaissance ni l'entendre lire,
que tous les grands dieux du ciel et de la terre le maudissent [d'une malédiction irrémédiable
De ces textes on peut conclure que le « drame sacré » semble bien représenter les différents épisodes de la « passion de Mardouk ».
On retrouve la « mort » du dieu lorsqu'il s'agit de divinités dont la disparition a pour effet d'arrêter la vie sur la terre aussi bien dans la « Descente d'Ishtar aux Enfers » que chez les Hittites avec le mythe de Télipinou ou plus tard avec Adonis en Phénicie. Le mythe de Bêl-Mardouk a aussi des analogies avec celui d'Osiris en Egypte. Dans les scènes que nous avons signalées il semble que Mardouk frappé soit délivré par Nabou. Cet épisode se retrouve aussi en Assyrie dont le dieu national a pris les mêmes caractères en plus d'autres, puisés à une source bien antérieure. Mais à Babylone, Mardouk n'apparaît pas seulement comme un dieu de « fertilité » ; il est bien plus encore : Mardouk est le dieu qui a vaincu le Chaos, le grand maître, le « régulateur » de l'Univers.
Pendant sa disparition et pendant qu'on le cherche, on lance dans la ville un char attelé de quatre coursiers et ce char est sans conducteur ; chacun des chevaux tire de son côté semant la panique. Il semble que le char soit le symbole de la domination de l'Univers, c'est le char de Mardouk qu'il ne dirige plus. C'est l'image du dérèglement général causé par la disparition du dieu conducteur. Un autre symbole de « folie » est fourni par un condamné (sorte de « roi des Fous » ), vêtu d'habits royaux et escorté d'hommes déguisés commettant des actes insensés. Ce « carnaval » met bien en lumière le rôle de Mardouk, maître du chaos et momentanément impuissant.
Dans le temple, nous apprenons que les deux statuettes fabriquées au début des cérémonies ont la tête tranchée et sont jetées au feu.
La Grande Procession du huitième jour
Le huitième jour est le point culminant de la fête. Bien que le texte ne le mentionne pas, c'est le retour (à la vie) de Mardouk qui va « paraître » ou « apparaître » dans la ville. Dès le matin, tous les dieux venus pour honorer Mardouk sortent et se rendent dans la chapelle des Destins où se décré. teront les destins de l'année. Pendant cette cérémonie, les Babyloniens ne devaient pas manquer de formuler des voeux ardents pour que les sorts leur soient propices ! Au cours de ces scènes les statues des dieux se lèvent, s'asseoient et se tournent à droite et à gauche. S'agit-il ici de statues, de poupées articulées ou de figurants ? Les chars du « carnaval » avec leurs « géants » articulés modernes pourraient très bien en présenter le reflet. On a trouvé relativement peu de statues divines. On peut cependant supposer qu'en Babylonie, comme en Egypte, il y aurait eu des statues articulées en bois dont la disparition a été complète. Ces statues pouvaient représenter le dieu et certains rites comme « l'ouverture de la bouche » ou la « purification de la bouche » étaient destinés à les animer. Il arrivait qu'elles devaient donner une réponse par un signe de tête. Dans les fouilles de Mâri, M. A. Parrot a trouvé une statue d'Ishtar qui serre contre sa poitrine un vase creux. Un conduit dans la statue communique avec le fond du vase. Il était donc possible de faire projeter de l'eau hors de ce vase « magique » au moyen d'un mécanisme.
Les statues réunies une première fois dans la chapelle des Destins et que le roi conduira pour leur faire prendre place, vêtues de leurs somptueux costumes, se rangent dans la cour accompagnées de leurs servants portant leurs insignes. De magnifiques chars les attendent. La cérémonie classique de la « prise de main » accomplie par le roi de Babylone donnait le signal du départ. On invoquait alors le dieu Mardouk et sa parèdre Zarpanit :
Sors, ô Seigneur, le roi t'attend!... Il sort, lé Seigneur de Babylone! Elle sort Zarpanit !... Côte à côte, les servantes d'Ishtar de Babylone jouent de la flûte, tout Babylone éclate en cris de joie!
Au cours de toutes ces cérémonies, on observait scrupuleusement tous les détails d'où l'on tirait des pronostics :
Si le roi saisit la main de Bêl et qu'il trébuche, il lui arrivera malheur! Si un cheval du dieu trébuche, le pays perdra la raison! Si quelque chose se rompt dans le bateau du dieu, les dieux bouleverseront le pays!
La Grande Procession partant de la chapelle des Destins par le portail nord de l'Esagil, la Porte Sacrée, arrivait dans la rue Aibourshabou ( « Que l'ennemi ne le foule pas ! » ), qui, entre l'Esagil et la tour à étages, l'Etémenanki, passait d'ouest en est, puis tournait vers le nord, longeait à l'est de l'enceinte le Qasr, débouchait dans la Porte d'Ishtar et sortait dans la Voie Processionnelle jusqu'au confluent du canal Arahtou et de l'Euphrate. On peut aisément réaliser cette fête grandiose passant dans ce décor féérique de briques émaillées ! On transbordait alors les idoles de leurs chars sur leurs barques ; il y avait une chapelle reposoir où l'on chantait des hymnes pendant ce temps :
O Seigneur, pourquoi ne sièges-tu pas à Babylone, ton trône n'est-il pas dressé dans l'Esagil
Après les adieux, les barques voguaient; « scintillantes comme les étoiles » , et à peu de distance les dieux mettaient pied à terre et reprenaient leurs chars vers la « Maison de l'Akitou, la Maison de Prière » , dans la campagne. Mardouk et les dieux demeurent à l'« Akitou » du huitième au onzième jour. Les cérémonies qui se déroulent dans l'Akitou rappellent les actes symboliques de la Création du Monde dont Mardouk est l'auteur. C'était une fête solennelle. Certains assyriologues pensent qu'il y avait encore récitation d'un « drame sacré ».
Le onzième jour Retour â Babylone
Le onzième jour, les dieux reprennent le chemin de Babylone, dans la nuit, à la lumière des torches. On s'imagine aisément ce somptueux cortège aux flambeaux défilant dans les rues et les lueurs se reflétant sur les murs aux décors vernissés dont les animaux fabuleux prenaient des allures fantastiques!
A son entrée dans l'Esagil, Mardouk était salué par cet hymne :
Seigneur, lorsque tu reviens dans ta demeure, ta demeure te dit : « La paix soit avec toi, Seigneur! » a Babylone, la ville de ta Joie ne la laisse plus inhabitée! »
Alors avait lieu une seconde et dernière réunion dans la chapelle des Destins. Le dieu Nabou, le Scribe des dieux, enregistrait les décisions qui prenaient un caractère d'oracle.
Sur un texte on note : « au mois de Nisan... Fêtes de Mardouk et de Zarpanit » ... « Mardouk celui qui sait tout, se rend à ses Noces. » Mardouk était donc conduit à la « Chambre Nuptiale » que nous connaissons sous le nom de « Chambre du Lit » de l'Etémenanki. C'était bien par un « mariage sacré », une hiérogamie, que la fête de l'Akitou se terminait. Il en avait toujours été ainsi probablement. Par magie sympathique, on admettait que cet acte avait sa répercussion sur la terre en favorisant les naissances et la croissance des êtres vivants et des végétaux. La Fête du Nouvel An était un souvenir de la religion primitive que la religion babylonienne n'a jamais oubliée complètement. Des présents de noces étaient offerts comme dans l'ancienne Mésopotamie. Le dieu donnait des cadeaux somptueux à son épouse. On peut penser que les « strenna » , les étrennes, sont en relations directes avec l'antique coutume babylonienne.
Nous avons remarqué déjà que le mariage symbolique du dieu semblait avoir été décrit par les auteurs grecs comme ayant lieu dans la chambre du sommet de la célèbre tour à étages où se tenait la femme choisie pour y passer la nuit et que nous pensons pouvoir identifier avec la « prêtresse » remplaçant la déesse Zarpanit.
Le douzième jour
Au matin du douzième jour, le dieu Nabou regagne Borsippa et les autres dieux retournent dans leurs sanctuaires respectifs. Les fêtes sont terminées. Le destin de Babylone va s'accomplir !
http://religion.mrugala.net/Phenicie/Babylone%20-%20religion.htm
Le Mariage Sacré dans d'autres civilisations:
Étymologie :
Hiérogamie est un terme technique des mythologues : il signifie tout simplement
“mariage sacré*”, du grec hiéros gamos :
« (Ce) mythe remontant à l’époque indo-européenne* est, au printemps,
l’union du dieu* du Ciel (ou parfois du Soleil) avec une déesse incarnant le pouvoir de
génération, de production. La forme la plus répandue est celle qui fait recouvrir la
Terre Mère par le Ciel Père. On la trouve chez les Germains, les Scythes, les Grecs,
union d’Ouranos le ciel avec Gaïa la terre, (ce qui donne le jardin Paradeisos)n.
Ces derniers célébraient le Hiéros Gamos, le Mariage Saint de Zeus et Héra la protectrice.
»
En effet, pour Jean Haudry (in La religion cosmique des Indo-Européens*, Arché,
Milano) : « un des thèmes majeurs de leur religion est le Héros s’immortalisant en
conquérant “la belle saison de l’année” ».
Mais cette étymologie est un peu courte car il nous semble remarquable qun’e
grec hieras, hieracos signifient “faucon”, d’où hieraticos “sacerdotal” et comment
alors ne pas penser à Circé, la devineresse au faucon *…
* Faucon : …et aussi aux premières dynasties des Ægyptos dont l’attribut était le faucon Horus, figurant le fils de Rê, le Soleil… Dans la mythologie* germano-scandinave, un aigle domine l’Arbre du Monde et il se nomme Aar. Les chevaux de la Soleil, Sol, étaient Arvak “Grand-Veilleur” et Alsvinn “Très-Rapide”. Har “Très-Haut éminent” est une Kenning pour Odhin ou Jafnhar “l’également éminent”, le second du trinêtre Odhin (Wotan) avec Thridi “le 3ème”, qui sont aussi trois “montagnes” ou trois dolmens gnomons de repérage solsticial aux fins de calage solaire de l’année ! (...)
A lire en format pdf (32 pages):
http://racines.traditions.free.fr/hierogam/hierogam.pdf
James Georges Frazer
L'anthropologue écossais sir James George Frazer (1er janvier 1854 - 7 mai 1941) est le premier à avoir dressé un inventaire planétaire des mythes et des rites. Les 12 volumes de son Rameau d'or, parus entre 1911 et 1915, décrivent des milliers de faits sociaux et religieux, soit relevés par l'auteur sur le terrain ou dans ses lectures, soit relatés par ses correspondants cosmopolites (diplomates, administrateurs coloniaux, explorateurs, missionnaires). En tentant d'interpréter cette masse de comportements, Frazer fondait — sans le savoir — l'anthropologie religieuse et la mythologie comparée.
"L'esprit du sauvage n'est pas vide; lorsqu'on se familiarise avec ses croyances et ses superstitions, avec la nature compliquée de ses lois et de ses coutumes, les idées préconçues qu'on se formait sur sa simplicité disparaissent bien vite... Nous nous moquons de ses fétiches et de ses superstitions, mais nous négligeons de suivre l'enchaînement d'idées et l'effort intellectuel qui les ont créés. Après des observations qui s'étendent sur plus de dix-neuf années, j'en suis venu à la conclusion qu'il n'y a rien dans les usages et les fétiches d'Afrique qui ne corresponde à un raisonnement défini." (Thomas Lewis)
"L'étude des peuples primitifs est extrêmement curieuse et elle est pleine de surprises. Il y a vingt ans que je suis parmi les tribus Thonga et Pédi de l'Afrique du Sud; plus j'avance, plus je m'étonne du grand nombre, de la complexité et de la profondeur des rites de ces gens qu'on qualifie de sauvages. Seul un observateur superficiel pourrait les accuser d'être superficiels. Si nous prenons la peine de chercher la raison de ces étranges coutumes, nous trouvons à leur base des raisons secrètes et obscures, des principes difficiles à comprendre et les plus fervents adeptes des rites eux-mêmes n'en peuvent donner l'explication. Découvrir ces principes, et donner ainsi la véritable explication de ces rites, telle est la tâche de l'ethnographie, tâche délicate entre toutes, car nous ne pouvons la mener à bien qu'en oubliant nos idées à nous pour nous plonger entièrement dans celles des peuples primitifs" (A. Junod)
Ces paroles de poids, fruit d'une longue expérience, méritent d'être méditées par ceux qui s'imaginent que le système compliqué des coutumes sauvages a pu naître sans un long processus de raisonnement dans l'esprit de ses fondateurs. Certes nous ne sommes pas toujours à même de découvrir la raison pour laquelle tel usage ou tel rite a pu être institué, car nous ne faisons que commencer à comprendre l'esprit du sauvage; mais tout ce que nous savons de lui tend à montrer que sa pratique, si absurde qu'elle nous paraisse, a eu son origine dans des raisonnements précis, et a un but défini et très certain. (commentaire de JG Frazer)
Il est nécessaire dés à présent d'introduire d'autres éléments et de citer les travaux de JG Frazer. Hélas il n'y a pas beaucoup de références sur internet ou de sujets s'y rapportant. Voici tout de même une présentation:
Roi sacré, victime sacrificielle et victime émissaire
« Je fais ici œuvre de science pure, car la science pure doit précéder la science expérimentale. »HOCART.
La science ne se réduit pas à l’érudition. Elle ne consiste pas seulement, disait Hocart, à accumuler des faits, mais aussi à trouver des leviers permettant de soulever la masse des faits. Fidèles à cette idée, les pages qui suivent ne contribuent pas à l’ethnographie de la royauté, ni à l’histoire des idées monarchiques, mais constituent un essai d’anthropologie théorique ou fondamentale. On n’y trouvera pas de nouvelles données relatives à la royauté, mais un effort pour rendre l’institution plus intelligible. Ni un panorama des théories de la monarchie, mais une sélection de quelques hypothèses convergentes et complémentaires. Ni une vérification empirique de ces hypothèses et de leurs implications, mais quelques principes unificateurs dont elles peuvent être tirées.
2 Dans le domaine considéré, la masse des faits déjà recueillis par les ethnographes et les historiens est énorme et risque de nous écraser, mais les leviers requis pour la soulever sont d’ores et déjà disponibles. C’est tout ce que nous voudrions montrer. Une théorie plus générale et plus complète serait possible, mais exigerait de longs développements. On se propose ici de jeter seulement les bases d’une axiomatique de la royauté.
AU COMMENCEMENT ÉTAIT FRAZER : ROYAUTÉ SACRÉE ET RÉGICIDE
3 Frazer a bâti sa théorie de la royauté à partir de deux idées maîtresses. La première est une donnée factuelle : la royauté n’est pas un pouvoir discrétionnaire, mais une lourde charge conduisant presque toujours son titulaire à l’échafaud. La seconde est une intuition géniale : l’étrange royauté du bois de Némi n’est pas un phénomène atypique, mais un condensé de tout le système monarchique et la clé de son interprétation.
4 Ces deux thèmes du Rameau d’or sont bien connus, mais méritent toujours la même attention. Rappelons brièvement, pour chacun d’eux, quelques points essentiels.
« Le fardeau de la royauté »
5 La compilation des données historiques et ethnographiques montre que, dans son principe, la royauté n’est pas un pouvoir politique, mais une charge rituelle écrasante dont l’issue est le plus souvent la mise à mort du monarque.
6 Régner ne consiste pas à gouverner ni à donner des ordres, mais à garantir l’ordre du monde et de la société en observant des prescriptions rituelles. Le roi est un personnage sacré, mais pour cette raison même, il est « ligoté » par le rituel. Assigné à résidence et reclus dans son palais, il est soumis au même type de restrictions que les êtres en état d’impureté : femmes indisposées, guerriers ayant donné la mort, criminels. Il est comme un condamné à mort en attente d’exécution. Le régicide n’est pas un accident, mais fait partie intégrante de l’institution.
7 Voici comment Frazer résume ses informations :
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« L’idée que les royaumes primitifs sont des États despotiques, où le peuple
n’existe que pour le souverain, est entièrement inapplicable aux monarchies
que nous étudions. Au contraire, le souverain, ici, n’existe que pour ses sujets;
sa vie n’a de valeur qu’autant qu’il s’acquitte des fonctions que comporte sa
position, en ordonnant le cours de la nature pour le bien de son peuple. Dès
qu’il manque à ses devoirs, les soins, le dévouement, les hommages religieux
qu’on lui prodiguait auparavant s’évanouissent pour faire place à la haine et
au mépris; on chasse ignominieusement le monarque déchu, et il peut se
féliciter s’il en échappe avec la vie. Adoré comme un dieu la veille, il est tué
comme criminel le lendemain. Mais il n’y a rien là de capricieux ou d’illogique
de la part de ses sujets. Leur conduite est, au contraire, très conséquente. Si
le roi est leur dieu, il est, ou devrait être, aussi celui qui les préserve; et s’il
a échoué, il doit céder la place à un autre qui n’échouera pas. Tant qu’il répond
à leur attente, ils prennent de leur souverain des soins infinis, et le forcent à
prendre de lui-même ces mêmes soins. Un roi de ce genre vit emprisonné
dans un protocole, un réseau d’interdictions et d’observances, dont le but n’est
pas de contribuer à sa dignité, encore moins à son bien-être, mais de l’empêcher
d’agir d’une façon qui, en dérangeant l’harmonie de la nature, pourrait
l’entraîner, lui, son peuple et l’univers, dans une commune catastrophe. Loin
d’augmenter ses aises, ces règles, en embarrassant chacun de ses actes,
annihilent sa liberté; et, tout en cherchant à préserver sa vie, lui en font souvent
une peine et un fardeau » [Frazer, 1981, p. 489-490].
9 Toutes les données recueillies depuis la parution du Rameau d’or corroborent ce tableau, en lui apportant tout au plus quelques compléments. Le roi n’est pas maître mais captif de l’institution. Même s’il n’est pas toujours tué, il doit pour ainsi dire frôler la mort – comme le roi moundang, mis à nu et entouré de son peuple en armes, pendant la fête de la pintade [Adler, 1982, p. 364-365] – ou un substitut rituel doit mourir à sa place, souvent dans des conditions violentes ou ignominieuses – comme le cheval du roi mossi, assommé à coups de bâton par des esclaves de la cour [ cf. Izard, 1990, p. 85, et communication personnelle].
10 En revanche, l’explication de ces coutumes royales n’a guère avancé. Le seul « progrès » notable des dernières décennies est la réhabilitation de Frazer, après un assez long purgatoire. Les spécialistes sont d’accord avec sa présentation des faits et postulent comme lui la cohérence de l’institution royale. Mais cette cohérence ne va pas de soi. Si le roi est un personnage sacré, ou même d’essence divine, il n’est pas évident que ses sujets soient habilités à le juger et à le mettre à mort. Dans le passage que nous venons de citer, l’auteur du Rameau d’or parle du régicide comme d’une conséquence nécessaire, et presque anodine, d’une règle de bon sens : « Si le roi est leur dieu, il est, ou devrait être, aussi celui qui les préserve; et s’il a échoué, il doit céder la place à un autre qui n’échouera pas. » Mais à prétendre ainsi expliquer les actions des hommes par leurs représentations, on ne fait que déplacer la question. Le sacré et le divin ne sont pas des données primitives dont on pourrait déduire les institutions. Il faut rendre compte à la fois des actions et des représentations. Nous y reviendrons après avoir terminé le rappel des principales vues de Frazer.
« Le roi du bois »
11 Frazer n’est pas le seul à avoir été intrigué par le rituel étrange de Némi, mais il est le premier à pressentir que son explication contribuerait à rendre intelligibles la plupart des mythes et des rites. Si le Rameau d’or se présente comme un énorme roman policier visant à résoudre une toute petite énigme, c’est parce que la solution attendue est censée éclairer l’ensemble des « formes élémentaires de la vie religieuse ». La singulière monarchie du bois sacré n’est pas seulement un « rite de référence » qui serait semblable au « mythe de référence » du « dénicheur d’oiseaux » dans les Mythologiques de Lévi-Strauss.
12 Il ne s’agit pas d’un point de départ arbitraire, d’un terme quelconque d’une série dont tous les autres termes s’obtiendraient de proche en proche par de simples transformations structuralistes, mais bien d’un modèle réduit de toutes les institutions monarchiques, d’un élément générateur de tout le système royal et de ses avatars transformationnels.
13 Relisons la description qu’en donne Frazer :
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« Dans le bosquet sacré se dressait un certain arbre auprès duquel, à toute
heure du jour, voire aux heures avancées de la nuit, un être au lugubre visage
restait embusqué. À la main, il tenait un glaive dégainé; de ses yeux inquisi-
teurs, il paraissait chercher sans répit un ennemi ardent à l’attaquer. Ce per-
sonnage tragique était à la fois prêtre et meurtrier, et celui qu’il guettait sans
relâche devait tôt ou tard le mettre à mort afin d’exercer lui-même la prêtrise
à sa place. Telle était la loi du sanctuaire. Quiconque briguait le sacerdoce de
Némi ne pouvait exercer les fonctions qu’après avoir tué son prédécesseur
de sa main; le meurtre perpétré, il restait en possession de la charge jusqu’à
l’heure où un autre, plus rusé ou plus vigoureux que lui, le mettait à mort à
son tour.
À la jouissance de cette tenure précaire s’attachait le titre de roi; mais
jamais tête couronnée n’a dû dormir d’un sommeil aussi fiévreux, hanté de
rêves aussi sanguinaires, car d’un bout de l’année à l’autre, hiver, été, sous
la pluie ou par le soleil, il avait à monter sa garde solitaire » [Frazer, 1981,
p. 19].
15 Comme on le voit, le roi du bois est vraiment un personnage singulier. Il réunit des traits ou des fonctions qui sont normalement séparés :ceux de meurtrier et de roi, de roi et de prêtre, mais aussi de sacrificateur et de victime sacrificielle, puisque la mise à mort est ici un acte rituel, et enfin d’esclave et de roi, puisque le titulaire de la charge était un esclave fugitif qui ne devait son salut qu’à ravir le poste de son prédécesseur [Frazer, 1981, p. 20].
16 Par un raccourci saisissant, le rituel lui-même rassemble, en un seul acte, le régicide qui met fin à un règne et le cérémonial d’installation qui inaugure un nouveau règne. Le roi est mort, vive le roi : jamais on n’aura mieux marqué la continuité de l’institution royale, malgré la mort, et par son truchement même.
17 Enfin, la royauté de Némi a beau être un rite marginal de la religion romaine, elle est aussi la plus stable des institutions du monde latin, n’ayant disparu, semble-t-il, qu’avec la chute de l’empire [ ibid., p. 19, note2]. Comme les singularités mathématiques, elle concentre des propriétés généralement disjointes et constitue ainsi le germe de toute une diversité déployée dans une multitude d’institutions. C’est pourquoi résoudre l’énigme de Némi et construire une théorie générale de la royauté ne sont vraisemblablement qu’une seule et même chose.
18 Il est vrai que, au terme de son enquête, Frazer donne le sentiment d’avoir en grande partie échoué [ 1984, p. 5] : de n’avoir élucidé entièrement ni le mystère de Némi ni la nature des institutions qui s’y rattachent. Car on sait que, pour résoudre l’énigme du roi condamné à mort, il propose deux théories qu’il n’arrive pas à bien articuler.
19 Selon la première théorie, le roi représente les forces de la nature et il est le garant de la prospérité générale : il doit être mis à mort dès que ses forces commencent à décliner, car il risque alors de nuire à son entourage. Selon la seconde théorie, le roi est un bouc émissaire, prenant en charge tous les maux qui peuvent atteindre le groupe : il doit être mis à mort pour purifier la collectivité dès que le salut de celle-ci paraît l’exiger.
20 Frazer pense que ces deux explications du régicide sont complémentaires plutôt que concurrentes, mais que la première l’emporte sur la seconde.
21 D’où l’ordre dans lequel elles apparaissent dans le Rameau d’or, les places respectives qu’elles y occupent (du moins, en première lecture) et les efforts de l’auteur pour greffer la seconde hypothèse sur la première. Mais sa démonstration est loin d’être parfaite et n’a guère convaincu la plupart de ses lecteurs.
22 Ni le poids respectif des hypothèses retenues ni leur compatibilité n’ont été établis clairement.
23 Or, à bien des égards, les choses n’ont guère progressé depuis la mort de Frazer, mais les descriptions accumulées par les spécialistes de la monarchie sacrée ont mis en évidence un point important, que laissait déjà entrevoir une lecture attentive du Rameau d’or. Elles montrent que le roi est avant tout, et non pas accessoirement, un bouc émissaire. C’est ce qui ressort, en particulier, de travaux récents de Luc de Heusch et de Declan Quigley. Nous voudrions faire quelques pas de plus dans la même direction, en essayant d’expliciter cette découverte et ses conséquences théoriques (...)
Source: http://www.cairn.info/revue-du-mauss-2003-2-page-197.htm
Nous pouvons encore mentionner le philosophe français René Girard qui a beaucoup écrit sur les thèmes du bouc émissaire et du sacrifice du roi. Je ne le citerai toutefois ici pas car ses travaux s'inscrivent dans un cadre purement philosophique même si les réflexions qu'il propose sont très intéressantes, et sont donc d'importance moindre.
Après cette introduction de Frazer je m'arrête ici pour ce jour. Non pas que j'ai terminé; il y aurait encore beaucoup à analyser et d'autres références à venir afin de construire mon sujet. Mais il est vaste cela me prendra certainement du temps. Aussi je vous demanderai d'être patient et dans vos commentaires pas de conclusion hâtive, ne vous éloignez pas trop de ce qui a été dit jusqu'à présent, car je ne vous ai pas tout montré. Ce serait sympa ^^
En attendant il y a déjà de quoi méditer.
D'ailleurs voici une symbolique moderne d'un Mariage Sacré:
Lady Gaga - Bad Romance