A retrouver en intégralité dans le très précieux Monde Diplomatique de juillet
Par Dominique Vidal
Né dans la Résistance, le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) n’a pas toujours été l’interlocuteur privilégié des pouvoirs publics (lire « De la clandestinité aux feux médiatiques »). Mais, après l’échec des négociations israélo-palestiniennes de Camp David, en 2000, il s’est radicalisé et a prétendu peser sur la politique de la France. Cette droitisation atteindrait-elle ses limites ?
« Il y a dans ce pays des hommes et des femmes intellectuellement courageux. Mme Monique Canto-Sperber, directrice de l’Ecole normale supérieure, en est un exemple. Elle a annulé un scandaleux colloque-débat (il faut mettre beaucoup de guillemets au mot de “débat”) qui devait avoir lieu à cette Ecole le 18 janvier [avec le résistant, déporté et ancien diplomate Stéphane Hessel]. Valérie Pécresse, ministre des universités, ainsi que le rectorat de l’Université de Paris, que nous avons contactés en urgence, ont réagi sans ambiguïté : je leur rends hommage, ainsi qu’à Claude Cohen-Tanoudji, Prix Nobel de physique, Bernard-Henri Lévy et Alain Finkielkraut. »
Ces lignes, écrites en janvier dernier par M. Richard Prasquier, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), ont mis le feu aux poudres : non seulement celui qui prétend parler au nom de l’ensemble des Juifs de France se réjouissait bruyamment de cette interdiction, mais il la signait crânement, « mouillant » avec lui une ministre et trois intellectuels renommés.
A l’exception de Cohen-Tanoudji, les personnalités invoquées nièrent avoir demandé cette interdiction. Même le secrétaire d’Etat Pierre Lellouche, pourtant fervent soutien d’Israël, déplora cette démarche « contre-productive » du CRIF, comme « toute entrave à la liberté d’expression ». Et la censure, comme souvent, se retourna contre les censeurs : au lieu des cent cinquante participants attendus rue d’Ulm, mille cinq cents personnes se retrouvèrent à l’heure dite, place du Panthéon, pour un rassemblement improvisé en faveur de la défense des libertés.
« Tribunal dînatoire »
Bien davantage qu’une simple bavure, l’anecdote signale une radicalisation dont les prémices remontent au début des années 2000, sous l’effet conjugué de trois facteurs. D’abord, l’échec des négociations israélo-palestiniennes lors du sommet de Camp David, aux Etats-Unis, en juillet 2000, qui sonne le glas du « processus de paix » d’Oslo. Alors premier ministre (...)
http://www.monde-diplomatique.fr/2011/07/VIDAL/20775
A lire aussi : La nakba retiré des manuels scolaires : http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2011-07-07-Nakba
Par Dominique Vidal
Né dans la Résistance, le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) n’a pas toujours été l’interlocuteur privilégié des pouvoirs publics (lire « De la clandestinité aux feux médiatiques »). Mais, après l’échec des négociations israélo-palestiniennes de Camp David, en 2000, il s’est radicalisé et a prétendu peser sur la politique de la France. Cette droitisation atteindrait-elle ses limites ?
« Il y a dans ce pays des hommes et des femmes intellectuellement courageux. Mme Monique Canto-Sperber, directrice de l’Ecole normale supérieure, en est un exemple. Elle a annulé un scandaleux colloque-débat (il faut mettre beaucoup de guillemets au mot de “débat”) qui devait avoir lieu à cette Ecole le 18 janvier [avec le résistant, déporté et ancien diplomate Stéphane Hessel]. Valérie Pécresse, ministre des universités, ainsi que le rectorat de l’Université de Paris, que nous avons contactés en urgence, ont réagi sans ambiguïté : je leur rends hommage, ainsi qu’à Claude Cohen-Tanoudji, Prix Nobel de physique, Bernard-Henri Lévy et Alain Finkielkraut. »
Ces lignes, écrites en janvier dernier par M. Richard Prasquier, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), ont mis le feu aux poudres : non seulement celui qui prétend parler au nom de l’ensemble des Juifs de France se réjouissait bruyamment de cette interdiction, mais il la signait crânement, « mouillant » avec lui une ministre et trois intellectuels renommés.
A l’exception de Cohen-Tanoudji, les personnalités invoquées nièrent avoir demandé cette interdiction. Même le secrétaire d’Etat Pierre Lellouche, pourtant fervent soutien d’Israël, déplora cette démarche « contre-productive » du CRIF, comme « toute entrave à la liberté d’expression ». Et la censure, comme souvent, se retourna contre les censeurs : au lieu des cent cinquante participants attendus rue d’Ulm, mille cinq cents personnes se retrouvèrent à l’heure dite, place du Panthéon, pour un rassemblement improvisé en faveur de la défense des libertés.
« Tribunal dînatoire »
Bien davantage qu’une simple bavure, l’anecdote signale une radicalisation dont les prémices remontent au début des années 2000, sous l’effet conjugué de trois facteurs. D’abord, l’échec des négociations israélo-palestiniennes lors du sommet de Camp David, aux Etats-Unis, en juillet 2000, qui sonne le glas du « processus de paix » d’Oslo. Alors premier ministre (...)
http://www.monde-diplomatique.fr/2011/07/VIDAL/20775
A lire aussi : La nakba retiré des manuels scolaires : http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2011-07-07-Nakba