Mario Draghi : drôle de futur patron de la banque centrale européenne !
Les chefs d'Etat et de gouvernement européens ont nommé formellement, le 24 juin dernier, Mario Draghi à la présidence de la Banque Centrale Européenne pour succéder à jean-Claude Trichet qui quittera son poste fin octobre 2011.
Mais Mario Draghi, actuel gouverneur de la banque d'Italie, a une vilaine tâche sur son CV. De 2001 à 2005, il fut vice-président Europe de la banque Goldman Sachs, qui a aidé la Grèce à dissimuler des milliards d'euros d'emprunts d'Etat.
Il assure qu'il n'était pas au courant...
Jésuite de formation, licencié en économie et commerce à l'université de Rome, Mario Draghi a été de 1991 à 2001 directeur général du Ministère du Trésor, chargé des privatisations. A ce titre, il a été membre du conseil d'administrations de plusieurs banques et sociétés en phase de privatisation (Eni, IRI, Banca Nazionale del Lavoro-BNL et IMI). De 2002 à 2005 il est le vice président pour l'Europe de Goldman Sachs, la quatrième banque d'affaires mondiale…
Il présidait la banque d’affaires américaine au moment où celle-ci, dans les années 2000, aidait la Grèce à maquiller ses comptes publics. Aujourd’hui, son rôle va être sans doute de préserver les intérêts des banques dans l’actuelle crise européenne.
A propos de la crise grecque, on pouvait jusqu’ici s’interroger sur les raisons qui poussaient la BCE et Jean-Claude Trichet à s’opposer de façon virulente - notamment à la chancelière allemande - à toute idée d’une quelconque restructuration de la dette grecque.
Cette attitude semblait incompréhensible puisque tous les analystes, y compris ceux des banques, s’accordent à considérer que la Grèce ne pourra pas assurer le service de sa dette dans les conditions contractuelles actuelles. Un rééchelonnement, voire une annulation partielle semblent de l’avis général inévitable. Vouloir retarder l’échéance ne fait qu’aggraver les dégâts économiques et sociaux provoqués par les plans d’austérité brutaux et impopulaires imposés aux Grecs.
La nomination de Mario Draghi clarifie d’une certaine façon les choses. La BCE défend non pas l’intérêt des citoyens et contribuables européens, mais l’intérêt des banques. Une étude britannique citée récemment par le journal Les Echos a le mérite de quantifier clairement le processus en cours. Cette étude indique que grâce aux « plans de sauvetage » de la Grèce et au « mécanisme européen de stabilité » mis en place par la BCE, le FMI et l’UE, « la part de dette hellénique aux mains des contribuables étrangers passera de 26 % à 64 % en 2014. Cela veut dire que l’exposition de chaque foyer de la zone euro va passer de 535 euros aujourd’hui à 1.450 euros ».
Le « sauvetage » de la Grèce est donc en fait une gigantesque opération de socialisation des pertes du système bancaire. Il s’agit de transférer l’essentiel de la dette grecque – mais aussi espagnole et irlandaise – des mains des banquiers vers celles des contribuables. Il sera ensuite possible de faire assumer les frais de l’inévitable restructuration de ces dettes par les budgets publics européens.
Comme le disent les Indignés espagnols, « ce n’est pas une crise, c’est une escroquerie ! ». Le Parlement européen a voté ainsi le « paquet gouvernance » qui réforme le pacte de stabilité en renforçant les contraintes sur les budgets nationaux et les sanctions contre les pays en infraction. Le Conseil européen a parachevé le travail par la suite. Et ce n’est pas la prochaine nomination de Christine Lagarde à la tête du FMI qui réduira l’emprise des banques sur les institutions financières internationales, bien au contraire.
Gouverner pour les peuples ou pour la finance ? La réponse est aujourd'hui claire : il va falloir que les peuples européens reprennent la main, pour construire ensemble une autre Europe…
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