http://www.cairn.info/article.php?REVUE=outre-terre&ANNEE=2006&NUMERO=1&PP=73
Une communauté musulmane hétérodoxe
La doctrine des alaouites – ou nusairis (nuşayriyya), du nom de son fondateur Mu.hammad ibn Nuşayr ’al-Nāmirī – est apparue en Irak au XIe siècle. Comme tous les chiites, les alaouites vénèrent Ali, cousin et gendre de Mahomet, au point de le considérer comme Dieu. Le Prophète occupe une place secondaire : il n’est que le voile qui masque le « sens » incarné dans Ali. Le troisième personnage de la trinité alaouite est Salman, compagnon du prophète, la « porte » de la connaissance. Ces trois personnages sont représentés par des symboles astraux : Ali est la lune, Mahomet le soleil et Salman le ciel. La présence d’une « trinité » dans leur religion a pu donner à penser que les alaouites étaient des chrétiens qui se seraient réfugiés dans la montagne lors de la reconquête musulmane[4] [4] Cf. Henri Lammens, « Les Nosairis. Notes sur leur histoire...
suite; en réalité, cette trinité provient de l’antique gnosticisme astral de l’Orient, qui s’était maintenu dans certaines sectes en dépit du christianisme et de l’islam Cf. Louis Massignon, « Nusairi », in Encyclopédie de...
suite. Une autre originalité de la doctrine alaouite tient à la croyance en la réincarnation.
Les alaouites accordent de nombreuses vertus aux ziyārāt, les marabouts dans lesquels sont placés les tombeaux des cheikhs : soigner la stérilité, faire en sorte que la moisson soit bonne…
Leur croyance en la métempsychose, le caractère secret de leur religion, l’absence de mosquées, la tolérance de l’alcool, le fait que les femmes ne soient pas voilées…, sans oublier leur isolement et leur pauvreté, ont contribué à la diffusion de légendes infamantes sur les alaouites Cf. Jacques Weulersse, op. cit. , p. 57. ...
suite. La secte fut condamnée par les docteurs de l’islam sunnite, tel Ibn Taymiyya, qui, dans une célèbre fatwa, jugea les nusairis plus infidèles encore que les idolâtres et déclara licite le djihad à leur encontre Cf. Heinz Halm, « Nusairi », in Encyclopédie de l’Islam,...
suite. Les alaouites n’étaient reconnus comme musulmans ni par les sunnites ni par les chiites duodécimains. Il fallut attendre une fatwa de circonstance Les autorités musulmanes prêchaient alors la réconciliation...
suite, prononcée en juillet 1936 par l’une des plus hautes autorités sunnites de l’époque, le mufti de Palestine Hajj Amin al-Husayni, pour qu’ils obtiennent leur reconnaissance officielle en tant que musulmans, et ce n’est qu’en 1973 que, sur les instances du président Hafez al-Assad auprès de l’imam chiite du Liban Assad fit valoir à l’iman chiite du Liban les bénéfices...
suite Musa al-Sadr, les alaouites furent enfin reconnus comme membres de la communauté chiite.
L’importance de la présence des alaouites dans les forces armées et dans les services de sécurité se vérifie également aux échelons inférieurs. Les camps militaires autour de Damas, Homs et Hama sont peuplés presque exclusivement de familles alaouites. Dans les villages du djebel Ansarieh, il est rare qu’il n’y ait pas un ou plusieurs militaires par famille. C’est là le résultat d’un processus historique qui a débuté sous le mandat français, alors que les alaouites commençaient à s’engager massivement dans l’armée. Comme toute puissance coloniale, la France a préféré intégrer dans l’Armée du Levant les membres des minorités – alaouites, druzes, chrétiens, ismaïliens et Tcherkesses – plutôt que les Arabes sunnites, qu’elle jugeait trop perméables aux idées nationalistes.
Ils dissocient la parole du Prophète, rapportée par le Coran, de la Parole de Dieu, et n’ont pas pour le Livre sacré une absolue révérence, car ils accusent les sunnites d’en avoir écarté des passages à la gloire d’Ali.
Politique et pragmatique, Hafez al-Assad a brillamment survécu à la chute de son allié soviétique, n’hésitant pas à s’allier aux États-Unis contre l’Irak en 1991.