Situation économique des États-Unis: Henry Paulson a perdu le contrôle des finances et de l'économie des États-Unis Henry Paulson a perdu le contrôle des finances et de l'économie des États-Unis
F. William Engdahl, 3 août 2008
Quand Henry Paulson a décidé de quitter son poste de président chez Goldman Sachs, la puissante banque d'affaires de Wall Street, pour aller à Washington comme Ministre des Finances en 2006, il a exigé des pouvoirs extraordinaires faisant de lui un autocrate de l'économie. Il les a obtenu. En plus d'être chef du Groupe de Travail du Président sur les Marchés Financiers, Paulson est aussi Ministre des Finances, président du Conseil d'Administration de la Réserve Fédérale, président de la Securities and Exchange Commission et président de la Commodity Futures Trading Commission. Le Groupe de Travail est pour le monde financier l'équivalent de la chambre de guerre du Pentagone. Paulson, et non pas le président de la Réserve Fédérale Bernanke, est la personne qui dirige l'administration de gestion de crise. Et ses dernières actions indiquent qu'il a perdu le contrôle des problèmes des entreprises semi-gouvernementales du crédit, Freddie Mac et Fannie Mae, qui font boule de neige, faisant s'effondrer le marché en multiples billions de dollars des Backed Securities (ABS), dans une économie réelle se combinant en pire crise depuis la Grande Dépression des années 30.
« Le système bancaire des États-Unis est solide. . . »
Faisant étrangement écho au Président Herbert Hoover en 1932, durant sa campagne présidentielle contre Roosevelt, suite au krach boursier et à l'effondrement de nombreuses petites banques, Paulson est récemment apparu sur les chaînes de télévision nationales, déclarant : « Notre système bancaire est sain et solide, » ajoutant que la liste des « difficultés » bancaires « constitue une situation parfaitement gérable. » En fait, ce qu'il n'a pas dit c'est que la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) a une liste de 90 banques en difficulté. Ne figurent pas sur cette liste des banques comme Citigroup, récemment encore la plus grande banque du monde.
Sa déclaration n'est guère rassurant. La Caisse d'épargne de Californie, IndyMac Bank, qui a été déclarée en faillite il y a un mois ne figurait pas sur la liste de la FDIC une semaine avant son effondrement. La réalité, c'est que la crise créée par la titrisation (transformation en titres boursiers) de millions de prêts hypothécaires immobiliers en nouveaux moyens financiers et leur vente aux fonds de pension et aux investisseurs se déploie comme une boule de neige dévalant les Alpes suisses.
Le signe de l'absence de contrôle est la déclaration de Paulson il y a quelques semaines : « les institutions financières doivent être autorisées à faire faillite. » C'était deux semaines avant qu'il aille au Congrès pour demander « le mandat du Congrès pour approvisionner et prêter à Fannie Mae et Freddie Mac à un coût illimité. » Comme je l'ai noté dans mon dernier article, Financial Tsunami: The Next Big Wave is Breaking: Fannie Mae Freddie Mac and US Mortgage Debt, ces deux entreprises privées assuraient quelques 6 billions de dollars de valeur de crédits immobiliers, la moitié de la totalité de la dette du crédit immobilier étasunien. Paulson a défendu sa demande en qualifiant Freddie Mac et Fannie Mae de « seules parties opérationnelles du marché du crédit immobilier. »
C'était avant sa déclaration sur la « solidité du système bancaire. » Pouvons-nous avoir un système bancaire solide, dont la seule partie opérationnelle est littéralement insolvable : ses dettes étant plus grandes que ses actifs ?
Il est bien connu à Wall Street que certaines des plus importantes institutions financières ont d'énormes problèmes inavoués avec les titres adossés à des actifs évalués bien au-dessus de leur valeur, faisant que leurs comptes semblent en meilleur état qu'ils ne le sont. Les noms Citigroup, Lehman Bros, Morgan Stanley, même l'ancienne firme de Paulson, Goldman Sachs, et bien sûr l'inventeur de la titrisation du crédit hypothécaire à risque, Merrill Lynch, tous détiennent un pourcentage énorme de ce qu'on appelle les actifs de Niveau Trois, qui sont des avoirs que personne n'est disposé à acheter, mais dont la valeur déclarée par la banque est établie sur une « lubie. » En bref, la valeur des institutions financières à la base du système financier étasunien est extrêmement surévaluée par rapport à la valeur qu'elles auraient si elles étaient forcées de se vendre sur le marché libre aujourd'hui. En aparté sérieux, les lecteurs ne devraient s'attendre à aucun palliatif économique sérieux à la crise de la part du Président Barack Obama. Le financier de la campagne nationale de Obama est le Président de l'immobilier de Chicago, le milliardaire Penny Pritzker, qui est l'héritier, entre autres, des hôtels Hyatt. C'est Pritzker avec Merrill Lynch qui ont développé en premier il y a dix ans le modèle de la titrisation du « subprime » immobilier, le déclencheur du tsunami financier actuel.
Déjà, Citigroup a été forcé d'aller à Dubaï, le chapeau à la main, pour demander des milliards en espèces. Il a annoncé après qu'il n'avait pas besoin de plus de capitaux. Maintenant, Citigroup vient d'annoncer le projet de vendre une partie de ses 500 milliards de dollars d'autres actifs pour lever des fonds. Citigroup est-il vraiment solvable est la grave question que se posent les investisseurs. De même, Merrill Lynch a levé 6,6 milliards de dollars de Mizuho au Koweït, a déclaré que c'était parfait, et une semaines plus tard, a dû lever encore d'autres capitaux. Morgan Stanley a vendu une part de 10% de la société à International Corp en Chine.
L'économie réelle se rétrécit rapidement
Derrière les déclarations rassurantes des Paulson et autres, d'après qui « le pire est passé, » la réalité de l'effondrement du crédit depuis août 2007 accélère la contraction économique qui, je l'ai dit à plusieurs reprises dans ces colonnes, dépassera la Grande Dépression de la période 1929-1938. Un bon ami, constructeur de maisons au chômage dans une partie prospère de l'Arizona, m'a juste envoyé la liste suivante du ministère des États-Unis des fermetures de magasin de détail. Il est intéressant de noter que les dépenses de consommation constituent plus de 70% du PIB des États-Unis, et que l'unique stratégie d'Alan Greenspan à la Réserve Fédérale après l'effondrement de la bulle boursière en mars 2000, fut de descendre les taux d'intérêt à leur plus bas niveau depuis les années 30, de façon à stimuler les dépenses de consommation à crédit, c'est-à-dire la dette, afin d'éviter la récession. Notez l'ampleur des fermetures de magasin à travers les États-Unis ces dernières semaines :
Ann Taylor ferme 117 magasins dans tout le pays.
Eddie Bauer ferme d'autres magasins après la fermeture de 27 d'entre eux au premier trimestre.
Cache, une association de femmes détaillantes, ferme 20 à 23 magasins cette année.
Lane Bryant, Mode Bug, Catherines ferme 150 magasins dans tout le pays.
Talbots, J. Jill : fermeture des magasins. Talbots fermera la totalité de ses 78 magasins pour enfants et hommes, plus 22 autres magasins qui ne sont pas performants. Ces 22 seront un mélange de magasins pour femmes de Talbots et de J. Jill.
Gap Inc ferme 85 magasins.
Foot Locker ferme 140 magasins.
Wickes Furniture est de en train de sortir des affaire et ferme la totalité de ses magasins. Ces détaillant de 37 ans d'ancienneté qui vise les clients à revenu moyen, a demandé la protection de la loi sur les faillites le mois dernier.
Levitz, le détaillant de meubles, a annoncé qu'il allait à la faillite et fermait la totalité de ses 76 magasins en décembre. Ce détaillant date de 1910.
Zales, Piercing Pagoda prévoit de fermer 82 magasins le 31 juillet suivie par 23 autres magasins qui ne sont pas performants.
Disney Store : le propriétaire a le droit de fermer 98 magasins.
Home Depot ferme 15 de ses magasins au milieu de l'effondrement de l'économie et du marché du logement. Cette démarche touchera 1.300 employés. C'est la première fois que la plus grande chaîne de magasin de rénovation de l'habitat ferme un magasin important.
CompUSA (fermé).
Macy's : 9 magasins fermés.
Movie Gallery : l'entreprise de location de vidéos prévoit de fermer 400 des 3.500 magasins Movie Gallery et Hollywood Video, en plus de la fermeture de sa chaîne de 520 sites de location de vidéos l'automne dernier suite à la faillite.
Pacific Sunwear : fermeture de 153 magasins Demo.
Pep Boys : fermeture de 33 magasins fournisseurs de pièces d'automobiles.
Sprint Nextel : ferme 125 sites de vente au détail avec 4.000 employés, après les 5.000 licenciements de l'année dernière.
JC Penney, Lowe's and Office Depot sont tous en réduction.
Ethan Allen Interiors prévoit de fermer 12 magasins sur 300 pour réduire les coûts.
Wilsons The Leather Experts ferme 158 magasins.
Bombay Company : La compagnie de Mumbai ferme la totalité de ses 384 magasins aux États-Unis.
KB Toys ferme 356 magasins à travers les États-Unis dans le cadre de sa réorganisation après banqueroute.
Dillard's Inc fermera encore six magasins cette année.
Tout le monde sait que des centres commerciaux et le commerce de détail représentent une part incroyable de la vie économique de tous les jours de la nation, depuis les magasins de meubles à ceux de vêtements, en passant par la location vidéo et le cuir. Le processus a seulement commencé et aucun des principaux partis candidats à la présidence n'a osé mentionner cette réalité économique sur le terrain, parce qu'ils n'ont évidemment pas de solution à proposer sans compromettre le financement de leur campagne. Obama est non seulement liée à Pritzker, mais aussi au milliardaire de Omaha, Warren Buffett, et à George Soros. McCain dépend de l'argent des contributions traditionnelles du Parti républicain, qui demande une réforme permanente de l'impôt sur le revenu pour les gains les plus élevés et un laissez-faire en faveur des banques dans le traitement de millions de propriétaires face à la confiscation de leur maison et à la saisie de leur patrimoine par ces dernières.
Craignant de mauvaises dettes, les banques des quatre coins du pays ont fortement diminué les prêts. Cela a aggravé l'effondrement de la consommation documentée ci-dessus. Des centaines de milliers de courtiers immobiliers, de petits et grands banquiers, des employés et des vendeurs du meubles, et des employés de la construction, sont dans l'incapacité de trouver du travail. Les offres d'emploi sont réduites en masse, et ceux qui travaillent ont souvent des heures de travail réduites. La vente de voitures en juin a plongé de 28% chez Ford, 18% chez General Motors, et même 21% chez Toyota, ce qui se traduira par plus de licenciements dans les prochaines semaines. Ce sera la prochaine vague de chômage.
La réalité économique ne se reflète pas dans les statistiques officielles des ministère du Commerce et du Travail. Les données sont constamment « révisées » pour cacher la triste réalité de l'année électorale.
Mon bon ami de Californie, l'économiste John Williams, a minutieusement suivi ces « révisions de données » depuis plus de 25 ans, et a découvert une manipulation de la réalité si alarmante qu'il a créé un service indépendant pour abonnés, intitulé « Shadow Government Statistics, » où il fait de meilleures estimations, calculées sur la réalité et non pas de la mythologie officielle.
Selon les calculs de Williams, l'économie étasunienne est tombée en récession, déterminée par deux trimestres consécutifs de décroissance du PIB en fin 2006. Depuis, la récession s'est aggravée de façon spectaculaire dans les 12 derniers mois. Fait peu connu, le Ministère du Travail publie également six statistiques différentes du chômage, de U1 à U6, qui est la plus complète. Le soi-disant « taux de chômage officiel » est le U3, très étroitement délimité, qui est de 5,5%. Cependant, comme le note Williams, le U6 est la vraie mesure, et il indique officiellement 9,7% de chômeurs. Ses calculs estiment en réalité à 13,7% le chiffre des chômeurs et des gens en quête de travail.
Un récit personnel
Le constructeur de maisons au chômage en Arizona, mentionnée ci-dessus, m'a envoyé récemment ses notes personnelles sur la situation :
Voici ce qu'il se passe pour les gens comme moi : Le marché immobilier alimente l'économie dans la plupart des régions du pays depuis au moins la dernière décennie. Notre marché est en baisse depuis trois ans. Nous avons vu le coût du travail augmenter pour les constructeurs, avec une forte diminution des acheteurs, tout le monde se serrant la ceinture, ou ne pouvant plus vendre les maisons existantes. De nombreux employeurs ont supprimé des milliers d'emplois. Les gens qui ont un emploi ont peur de le perdre. Conduire sur de longues distances pour travailler n'est plus possible avec le prix de l'essence double de celui de 2006. La valeur de la maison de la majorité des gens est en baisse de 40%. Beaucoup de gens sont « submergés » sous leur maison : ils doivent plus que sa valeur au prix du marché d'aujourd'hui. En fait, de nombreux sous-employés ne sont pas montrés dans les statistiques du chômage. Les travailleurs indépendants, comme moi, ne sont jamais comptés.
Aujourd'hui, personne ne construit. La liste de maisons invendues a triplé depuis 2003. Les banques ne donnent plus de crédit facile aux acheteurs. De nombreux agents immobiliers que je connais ont passé deux ans sans vendre une maison. Les devantures de magasins vides deviennent banales. Dans de nombreuses régions, le taux de chômage dans les métiers de la construction est de 50% ou plus. N'ayant plus de travail manuel, des dizaines de milliers de Mexicains clandestins sont retournés au Mexique pour trouver du travail. Que faire maintenant ? Eh bien, je fais des travaux de bricolage de toutes sortes, petits et grands, qui procurent environ 70 à 90% de ce qu'il faut pour survivre avec ma femme et mes trois enfants en bas âge. Mes économies comblent le reste. Cela ne peut continuer très longtemps. Nous sommes passés de riches et à l'aise à craintifs et fauchés avec des possibilités diminuées en seulement trois ans. Nous sommes habitués à être la classe moyenne.
Original :http://www.engdahl.oilgeopolitics.net/Financial_Tsunami/Paulson/paulson.html
Traduction libre de Pétrus Lombard pour Alter Info
source:
http://www.alterinfo.net/Situation-economique-des-etats-Unis-Henry-Paulson-a-perdu-le-controle-des-finances-et-de-l-economie-des-etats-Unis_a22433.html?PHPSESSID=7d3a74f6ae758a7bfd36a9a25c4740df